Bonjour,
Je suis enseignant depuis maintenant 20 ans, je suis actuellement sur plusieurs niveaux, college, lycée technologique et lycée professionnel (et du post-bac), essentiellement en maths-sciences. J’ai essayé de faire autrement dans ma classe de 4eme collège cette année, classe que je n’avais pas avant. En plus, ça tombe dans la réforme du collège, j’ai une collègue qui a l’autre classe de 4ème, et le “découpage” entre les 5eme, 4eme et 3eme a déjà été effectué de par le choix de manuels par classe et non par cycle complet. De plus, chose totalement nouvelle pour nous, l’introduction de l’algorithmique, par le biais du logiciel Scratch. J’ai donc décidé un peu par hasard de faire “autrement”. Chacune de nos classes possède un nom : pour les miens, c’est Thalès. Donc, au premier cours, je leur ai demandé ce que cela voulait dire. Ils ont commencé à me donner beaucoup de propositions, toutes rattachées à des notions de mathématiques : c’est un théorème, c’est un triangle… avant de dire qu’avant tout, c’etait une personne. Qui a vécu au Moyen-Age ! Le reste de ce premier cours a consisté à lister au tableau leurs connaissances en histoire, les différentes périodes, et comment faire pour représenter tout cela. Le premier travail de classe était trouvé : la construction d’une frise qui occuperait la totalité du mur. A eux de chercher qui était donc ce Thalès, ses dates, et les différentes périodes historiques. Au cours suivant, j’ai ramené un mètre-ruban et à eux de prendre les mesures. Puis de trouver la longueur possible de la frise. Et donc de déterminer une échelle. Et que voulait dire ces signes (-). Combien de temps a vécu Thalès. J’avais ramené une liste de mathématiciens de l’Antiquité, et ils ont du retrouver comment calculer une soustraction de relatifs. Puis établir une échelle. Toutes ces notions, partant donc de petites situations concrètes, n’étaient pas formalisées en cours : je leur ai demandé de chercher dans leur manuel, ou ailleurs. Pour info, ma salle de classe, assez petite, ne dispose pas encore de rétroprojecteur, ni d’ordinateur, juste un tableau blanc d’environ 2m de long sur 1m20 de haut à peu près. A eux ensuite, à la maison,de créer leur cours, chercher les propriétés qui correspondent à la situation étudiée, au calcul qu’ils ont du faire, à l’exercice cherché, pour ensuite le recopier dans leur cahier. Ils sélectionnent ce dont ils ont besoin. Bien sûr, pour ne pas être en décalage avec l’autre classe, et pour que chacun puisse avoir la même base de cours pour l’année prochaine (regroupement des deux classes en 3eme), je leur donne un polycopié de cours “standardisé”. Thalès (non étudié en 4eme, de par le choix du découpage, mais que j’ai décidé d’étudier : après tout, l’autre classe se nomme Pythagore, mais il est postérieur à Thalès !) est connu pour avoir mesuré la hauteur de la pyramide de Khéops. Par groupe, les élèves ont effectué des recherches sur les différentes pyramides, les pyramides de Gizeh, la civilisation égyptienne, la civilisation grecque et Thalès (et donc son théorème). Chaque groupe présentera son exposé à la classe. Donc pour l’instant, nous avons revu les nombres relatifs et les opérations, la proportionnalité et les échelles, nous allons étudier le théorème de Thalès d’une manière historique : d’abord, avec les pyramides à degrés, qui permettront d’apprendre les carrés (merci les Lego), puis suivant la météo, utiliser le soleil pour reproduire à l’aide d’une maquette, ou à défaut emprunter le laser du labo de sciences… tout ceci présenté par un groupe d’élèves.
Pour ce qui est de l’algorithmique, pour faire bref, les élèves sont en train de construire un jeu vidéo : ils ont dessiné leur personnage principal, Thales, en pixels. Ils ont fait de meme des autres personnages qu’il croisera dans la pyramide, pour aller récupérer son gnomon. Cela permet de revoir tout ce qui concerne la symétrie, puis les rotations, les translations. Chaque tableau est d’abord dessiné sur un plan à l’échelle de la fenêtre de visualisation. Je suis à chaque fois bluffé par leur rapidité d’adaptation, leur trouvaille pour les déplacements, leurs idées… J’attends avec impatience la fin des vacances (oui, même si elles ne font que commencer) pour passer une nouvelle heure avec eux. Je regrette de ne pas avoir de salle suffisamment grande pour travailler en petits groupes, par pôles, ni d’avoir la possibilité de les faire programmer en direct, ou utiliser géogébra, par exemple. j’aurai peut être un video et un ordi pour Noel (en tout cas, je l’ai mis sur ma liste). Je n’ai pas développé ici la totalité des séquences que j’alterne avec des séances d’exercices afin de préparer les devoirs surveillés et grosses évaluations qui doivent être communes aux deux classes.
Ce n’est qu’une partie du travail : j’ai trouvé une problèmatique et j’aimerais qu’ils développent des outils pour y répondre, qu’ils expérimentent, qu’ils développent aussi un peu de sens critique par rapport à ce qu’ils lisent.
J’ai commencé à lire le livre de Céline, je m’interesse aussi à Montessori, il y a peu de collège, encore moins de lycée pratiquant d’une autre façon.
Je me suis donné jusque décembre pour en gros, faire ce dont j’avais envie.
Les élèves en tout cas, sont partants : un atelier supplémentaire pour les volontaires a été mis en place le midi pour qu’ils s’amusent à programmer, dessiner, modéliser, pixéliser…
Ils veulent pouvoir montrer un niveau jouable de leur jeu aux portes ouvertes fin janvier.
Voilà, je suis prof de maths dans un collège privé, je me sens un peu seul, je “bricole”, j’essaye, j’espère qu’en lisant le livre je trouverai des réponses, un chemin, que vos commentaires ou échanges me guideront aussi : j’essaye juste de faire “autrement” que les années précédentes. Car prendre le manuel, chapitre 1, activité, on copie le cours, on fait les exercices… je ne me sentais pas refaire ça.
Merci d’avoir pris le temps de me lire.
Je suis à l’écoute de vos remarques, conseils.