Efficacité pédagogique : Le Projet Follow Through


#22

Ce que je retiens c’est que la méthode la plus efficace est celle de la bienveillance!
On peut se tromper, mal présenter, être trop directif, ça se rattrape ! La bienveillance permet à l’enfant de s’ouvrir et de lui donner confiance. Le matériel, les activités proposées peuvent leur donner envie d’apprendre; mais ce n’est pas suffisant! Ne soyons pas trop stressés par tous ces coups de massue !


#23

Manuel,merci d’avoir lancé ce débat qui me passionne. Je suis d’accord avec ce que disent @zartine et @ADE si la personnalité de Céline et celle d’Anna ont sans doute joué, elles n’auraient probablement pas obtenu les mêmes résultats avec un autre système. Les vidéos et livres te donneront sans doute des réponses mais il y a une chose que tu ne peux observer qu’en classe c’est quand tes élèves se changent en “mini-experts”, comme le dit aussi Mélanie.Quand le savoir se transmet de l’un à l’autre: alors il y a un effet papillon que la recherche peut difficilement quantifier.


#24

L’étude follow through a été remise en question car ceux qui ont réalisé l’étude (Englemann, Becker et Bereiter) semblent être les inventeurs et les promoteurs de la méthode d’instruction directe… Je suis un peu perdu…tromperie ?
http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/contribs_FaussesPreuves.aspx


#25

Superbe article. Par contre, il faut bien lire l’ensemble de l’article de Pouts-Lajus, la réponse de Mario Richard et Steve Bissonnette, puis la réponse finale de Pouts-Lajus. Le débat entre les auteurs est très intéressant et se faire un avis n’est ni simple, ni aisé. J’ai vraiment l’impression qu’évaluer l’efficacité de pratiques pédagogiques est très compliqué notamment à cause :

  • du choix du professeur pour la pratique à adopter, comme l’avait souligné @LucE

  • la difficulté de pouvoir labeliser une pratique pédagogique

  • ce que l’on considère comme réussir un objectif / acquérir une compétence

Toujours est-il que deux pratiques générales se démarquent : l’une centrée sur l’enseignement et l’autre sur l’apprenant et tout le débat est là-dessus. Pour le moment la méthode centrée sur l’enseignement est la plus répandue.

Maintenant, ce que j’aimerais savoir, c’est comment classer la pratique d’Alvarez et en comprendre sa structure. J’en ai encore parlé autour de moi et plusieurs personnes pensaient que sa pratique était centrée sur l’apprenant…


#26

Après m’être repenché sur le livre “les lois naturelles”, j’ai trouvé ce passage de Céline Alvarez :
Should There Be a Three-Strikes Rule Against Pure Discovery Learning?
" si la recherche indique que l’activité autonome de l’enfant est la meilleure option d’apprentissage, elle précise également que les méthodes de la découverte pure qui laissent l’enfant découvrir les concepts entièrement par lui-même sont à proscrire. […] Ces études ont été menées sur plusieurs décennies, et offrent donc un recul très intéressant. Si l’être humain est câblé pour apprendre par sa propre activité, il n’est pas pour autant prédisposé à apprendre seul, sans aucune aide. C’est là tout le paradoxe : le jeune humain doit apprendre par lui-même, mais avec l’aide de l’autre" p72
Et elle enchaîne avec l’indispensable guidance de l’autre.

(Je continue…)


#27

Merci pour ce débat ! Je viens de le découvrir, après ma découverte récente du Projet Follow Through qui m’a fait me plonger dans d’inteses réflexions. Comme toi @Manuel, cette découverte m’a fait l’effet d’une bombe et je pense que nous avons suivi un cheminement intellectuel semblable !

Après observation de quelques classes Montessori et de professeurs qui s’inspirent de la démarche de C. Alvarez et d’après la lecture des Lois naturelles, notamment le passage que tu cites, il est clair pour moi que cette pédagogie est de la Direct Instruction, dans le sens où le professeur va modéliser un geste, selon un scenario très précis pour qu’il soit le plus efficace sans surcharger sa mémoire de travailde détails inutiles, afin que l’enfant sache exactement quoi faire et puisse ensuite pratiquer seul. Par la certaine liberté des enfants dans leur rythme et leurs envie, ces pédagogies sont souvent mal comprises, car assimilées à des pratiques d’écoles démocratique ou type Sudbury, or, il n’en est rien. Précisément si un enfant veut apprendre à faire ses lacets, ni C. Alvarez ni M. Montessori ni aucune étude récente (voir les méta-analyses d’Hattie) ne proposent de laisser l’enfant découvrir seul comment faire.

C’est aussi exactement ce qui est à l’oeuvre dans la “Méthode de Singapour” en mathématiques qui rejoint tout à fait des pratiques de C. Alvarez :

  1. passage du concret vers l’imagé puis l’abstrait.
  2. modélisation par le professeur.

Le projet Follow Through et le “Visible Learning” (ainsi que toutes les conclusions d’Hattie, qui fai des complations d’études sur le sujet) ne prônent pas un retour à “la classe traditionnelle” qui serait simplement un cours dans lequel seul le professeur est actif. Les “pratiques efficaces” selon Hattie mettent en branle nos préjugés car elles ne correspondent pas à une case précise. C’est à la fois une grande exigence de la part du professeur, qui doit connaître exactement où en sont ses élèves à chaque instant et les étapes à franchir pour les faire progresser (ce qui implique des évaluations fréquentes sous diverses formes, et une excellente connaissance du développement de l’enfant), beaucoup de feedbacks pour que l’enfant sache toujours précisément où il en est) et un gros travail de métacognition (pour que l’élève sache comment résoudre ses problèmes et se fixer des objectifs), de l’enseignement mutuel, un environnement sécurisant et bieveillant etc…

C’est un sujet vraiment passionnant, merci encore @Manuel de l’avoir lancé ici :slight_smile:


#28

Merci pour ton message. Il me touche. J’ai pu relire le débat et de voir à quel point j’étais flou par rapport à la démarche d’Alvarez. Je pense que @Ade avait touché des points intéressants avec le recul.

Par rapport à ton lien "Visible learning’ d’Hattie, certaines de ses conclusions sont déroutantes. Le chiffre donné s’appelle la taille de l’effet, sachant que un effet moyen est + 0.40.

  • Retention : - 0.17
  • Welfare policies : - 0.12
  • Teacher education : + 0.12
  • Mobile phones : + 0.29
  • Teacher effects : + 0.32
  • Reducing Anxiety : + 0.36
  • Goals : + 0.40
  • Motivation : + 0.44 !!
  • Concentration/Engagement : + 0.45 !!!
  • Teacher Credibility : + 0.90
  • Self reported grade : + 1.33
  • Teacher estimates of achievment : + 1.62

De savoir que se prédire une note est plus efficace que de cibler des buts, c’est fou.

Je vais être plus attentif à tout cela quand même. Merci pour le lien, encore de quoi se casser la tête :wink:

[EDIT] : TED : Hattie Visible learning


#29

Bonsoir,
du coup, ça me laisse perplexe Teacher estimates of achievment +1,62, ça veut dire que notre évaluation d’enseignant est plus importante que l’autocorrection.
Après, on parle ici des connaissances de base, pas de la construction du citoyen de demain…
Coup de massue pour moi aussi mais merci, c’est hyper intéressant.


#30

Effectivement, cela montre vraiment les responsabilités du professeur et surtout son attitude, plus que ses connaissances. Quand on voit que sa crédibilité auprès des élèves est aussi un paramètre important, je pense vraiment que tout se passe sur la qualité de la relation entre élève/professeur et professeur/professeur.

Après, je voudrais plus de détails sur les méta-analyses de Hattie. Il a construit une véritable entreprise de ses recherches et du coup, c’est très vendeur. J’aimerais bien avoir des critiques.


#31

Merci beaucoup Manuel d’avoir ouvert ce sujet très intéressant;
Du coup, mon premier achat de 2018 est le livre de John Hattie “L’apprentissage visible pour les enseignants” (en français bien sûr :grinning: car ce qui me manque pour participer au débat, c’est une lecture complète des résultats des travaux de J.Hattie)


#32

Bonjour @Manuel et tous les autres
avant tout merci d’avoir lancé ce débat que je trouve passionnant.
En fait la pédagogie explicite (direct learning) est la pédagogie déjà préconisée par Pierre Bourdieu dans les années 60/ 70 pour réduire les inégalités scolaires. En effet elle permet de lever les implicites de la pédagogie traditionnelle qui reposent sur le capital culturel de l’élève et donc excluent certains élèves sur des aspects qui ne sont pas transmis explicitement dans la culture scolaire.
Dans son livre " réapprendre à lire " Sandrine Garcia, sociologue également explique dans le premier chapitre également tout le mal qu’ont pu faire certains courants pédagogiques centrés sur l’enfant mais totalement déconnectés du réel et au final assez élitistes dans les résultats qu’ils entraînent malgré de bonnes intentions de départ. En tous cas moi ça m’a éclairée sur ce qu’on m’a enseigné à l’IUFM qui était souvent complètement à côté de la plaque ! En revanche j’ai toujours été pro " méthodes actives " et je pense que s’il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain il faut faire très attention à apporter à l’élève toute la guidance dont il a besoin pour apprendre surtout lorsque sa culture est éloignée de la culture scolaire (sans être moins "valable " pour autant d’ailleurs).
Pour en revenir à l’expérience de Gennevilliers je pense personnellement qu’il est utile non pas de mettre “les gens dans des cases " mais de pouvoir définir une grille de lecture qui permette de déterminer ce qui est aidant pour les enfants parce qu’au final si on se retrouve sur ce forum c’est que c’est ce qui nous anime tous, je pense. Il ne faut pas confondre le type de relation mis en place avec la personnalité de l’enseignant parce qu’heureusement ça se travaille et on progresse avec le temps et l’expérience.
En tous cas pour ce qui est de l’apprentissage de la lecture la pédagogie Montessori est très directe puisqu’il repose sur l’apprentissage explicite du code contrairement aux méthodes socio-constructivistes qui mettent en avant le sens au détriment des activités mécaniques jugées " abrutissantes” pour des élèves qui n’en sont pas encore là et doivent deviner, inférer ce qui posent problème aux plus fragiles. Pour le reste des activités je dirais que l’aspect modélisant est très fort puisque l’adulte montre à chaque fois ce qui est attendu puis l’élève s’entraîne… c’est même d’ailleurs ce que certains lui reprochent parfois, que l’enfant ne soit pas créatif. le choix de l’activité en doit pas occulter le fait qu’au final c’est un choix limité entre des activités très structurées et en plus avec un certain ordre de progression pour être sûr que l’élève a les prérequis nécessaires. L’ordre des présentations permet à l’enseignant et à l’élève de savoir où il en est et même pour l’enfant d’avoir une perspective de ce qui l’attend par la suite pour avoir déjà vu les plus grands.
Sinon le domaine de ce que l’enseignant transmet à l’enfant en terme de jugement et ses effets est passionnant et en même temps troublant : je suis en train de lire “l’école des incapables ?” un livre de sociologie sur la maternelle et là c’est claque sur claque


#33

Merci pour tous vos échanges que je trouve passionnants !


#34

C’est cool si cette question fait écho. La question d’efficacité est une question importante. J’imagine que dans ce cas, c’est l’acquisition de compétences précises sur un plus grand nombre d’élèves avec un minimum de temps.

Je dois avouer avoir beaucoup de difficultés à mettre en application certains concepts. Par exemple les instructions directes, tout n’est pas clair dans ma tête. Tout comme le “self reported grades” (se mettre une note), je ne suis pas sûr comment le mettre en application dans ma classe. Et je n’arrive pas à trouver une synthèse et des exemples précis. Du coup, je suis très hésitant dans ce que je produis.

Voilà, entre comprendre les paramètres qui sont efficaces, ce qu’ils cachent et ce qu’ils représentent, et produire le matériel ou le support de cours qui répondent à ces paramètres est pour moi très dur. De plus c’est vraiment chronophage !!

Je suis vraiment à la peine là-dessus et un peu découragé/démotivé.

La méthode de Singapour concret-imagé-abstrait / modélisation est aussi très intéressante s’il a été formalisé pour le premier degré. Maintenant comment l’appliquer au deuxième degré ? C’est aussi très chronophage.

Je n’arrête pas de travailler, et je n’arrive pas à poser de structure claire dans mes cours… Le désespoir me guette.

@Laureline

En tous cas moi ça m’a éclairée sur ce qu’on m’a enseigné à l’IUFM qui était souvent complètement à côté de la plaque !

contrairement aux méthodes socio-constructivistes qui mettent en avant le sens au détriment des activités mécaniques jugées " abrutissantes" pour des élèves qui n’en sont pas encore là et doivent deviner, inférer ce qui posent problème aux plus fragiles.

Tu pourrais développer ?

Merci