Jeux symboliques


#1

Bonjour,
Je ne retrouve pas la vidéo où Céline expliquait pourquoi ne plus proposer les jeux symboliques en classe (éventuellement à l’extérieur). Elle y parlait d’insulte à l’intelligence de l’enfant. Qu’il est préférable que l’enfant “apprenne” avec de vrais objets dans de vrais situations. Mais je n’ai pas assez d’arguments pour mes collègues qui me disent que c’est important d’imiter et que les enfants “aiment” faire comme les parents par exemple…
Vous rappelez-vous l’intitulé de cette vidéo ? Et qu’en pensez-vous ?
Merci d’avance,
Kristel


#2

Bonjour Kris,
Je ne me souviens plus de la vidéo exacte qui en parlait, mais je me souviens comme toi qu’elle disait cela oui. Si j’ai bien compris, le problème c’est que les jeux d’imitation utilisent souvent du matériel en plastique, plus petit, factice, et pas du vrai matériel. Ce que les enfants aiment avant tout c’est justement utiliser le même matériel que leurs parents, et ce pour une même utilisation.
Céline Alvarez critiquait aussi (dans les premières vidéos en Belgique) l’utilisation détournée des vrais objets du quotidien (plats à escargots et autres…).
Dans la pédagogie Montessori et dans la classe de Genevilliers, les enfants utilisent du vrai matériel utilisable en contexte : éponge pour nettoyer la table, bac pour laver le linge, éplucheur pour préparer la collation… donc ils font bien des activités d’imitation, mais réelles.


#3

De mon expérience, les jeux d’imitations sont plus destructifs (bruits, excitation) que constructifs. Mais j’admets volontiers que c’est moi qui n’arrive pas à en faire quelque chose d’intéressant avec.

Je pense que le matériel qui ressemble à des jouets (en plastique, qui fait semblant, …) encourage les enfants à jouer, comme ils le font à la maison ou en ludothèque (ce qui est super intéressant, mais c’est un autre cadre).

Une alternative déjà serait d’utiliser pour certaines activités du vrai matériel (vaisselle en céramique; vrais outils de bricolage adaptés; etc.). Expliciter, montrer ce que l’on peut faire avec (là aussi je ne le fais pas assez -> ça dégénère vite du coup). Et y mettre du sens : la vaisselle ça peut être pour mettre la table (travail de numération en plus), quitte à ce qu’il n’y ait pas de vrai nourriture dedans (pour isoler un geste du quotidien; ou pour préparer à plus tard mettre en place le goûter).

N.B.: l’argument comme quoi les enfants “aiment” ce matériel… ils aiment aussi les écrans, lancer le matériel, taper avec pour faire du bruit, crayonner dessus, crier, gratter/déchirer (ellipse, étiquettes, livres,…), etc. C’est pas pour ça que c’est constructif :smiley:


#4

Je rebondis sur ce que dis Charles. Effectivement, il y a du matériel/des jouets pour faire semblant (en plastique, type dinette…) et du matériel véritable à utiliser en contexte. Il me semble que cela ne fait pas travailler la même chose : le premier fait travailler l’imagination et la créativité, mais peut aussi demander à l’enfant de solliciter du langage (vocabulaire) et des maths (calcul) ; le second fait travailler les fonctions exécutives avec un objectif à atteindre (donc planification, concentration, autocorrection…).
En revanche, je me demande si c’est si mal que les enfants jouent à l’école (pas en roue libre bien sûr)? Comment leur enseigne-t-on la création (à part en arts plastiques), quand sollicite-t-on leur imagination ? Les enfants de cet âge (maternelle) semblent avoir un réel besoin de se créer des histoires, leur monde. Ne devrait-on pas les accompagner là-dessus aussi? Est-ce si mauvais pour eux de jouer à faire semblant? Ce n’est pas dit qu’ils le fassent tous à la maison.
Dès lors, pour accompagner les jeux d’imitation, ne pourrait-on pas leur proposer des scenari avec un objectif à atteindre et une compétence à travailler? C’est juste une réflexion que je me fais.


#5

Je suis plutôt d’accord avec ce qui a déjà été dit. De ce que j’ai vu dans des classes, les coins jeux d’imitation nécessitent un adulte pour bien fonctionner. Même lorsque des règles strictes encadrent ces activités (nombre de personnes entre autre), le matériel est très vite détourné et peu respecté dans la mesure où c’est pour faire semblant.
Du coup, il n’y a pas besoin de matériel spécifique pour faire semblant, mais plutôt des moments dédiés, à mon avis.
J’ai mis en place un temps de déguisement dans la salle polyvalente le mercredi, avec des bijoux, des vêtements et des tissus à disposition. Après quelques semaines, les enfants réalisent une tente avec les tissus et ce qu’ils trouvent dans la salle. C’est très intéressant… mais sous surveillance.


#6

Bonne idée ce temps de déguisement!


#7

Je suis d’accord avec tout ce qui a été dit. Céline, et avant elle, de nombreux pédagogues, privilégiaient l’utilisation de vrai matériel dans de vraies situations. Dans ce cas, l’usage doit être présenté au préalable et les enfants ne détournent quasi jamais l’utilisation de ces objets (pichet, pinces, vaisselle…). Ils imitent l’adulte. Les jeux symboliques en autonomie font appel à leur imagination, donc souvent détournés, parfois avec beaucoup de talent, le plus souvent c’est brusque et bruyant et les jeux sont moins biens respectés, vite abîmés ou cassés. Mais ces jeux avaient l’avantage de faire travailler le langage en interaction avec les pairs. Ce qui n’est pas vraiment le cas je trouve des ateliers de manipulation et de motricité fine de Céline. Comme je travaille dans une école internationale, mes élèves doivent apprendre à parler le français, cela se fait avec moi mais aussi au contact des autres enfants. J’ai donc tenté une alternative, inspirée par le travail de maitresse Melanie et ses espaces à scénario. Elle utilise du matériel du quotidien (vaisselle, fruits, légumes, perles…), joli, souvent fait maison, en bois, en tissu, en peluche, rarement en plastique c’est vrai, pour proposer des ateliers d’apprentissage par l’imitation. On peut donc jouer à la marchande, au pizzaiolo, au vétérinaire, au facteur, au bibliothécaire, à la dame du pressing… Comme pour les ateliers de Céline, le scénario est présenté aux élèves. Chaque objet a une place et une règle d’utilisation. Chaque scénario a un objectif ou plusieurs objectifs d’apprentissage. Le résultat est vraiment bluffant. Les élèves s’approprient le scénario, jouent entre eux, font la queue, observent, commentent, font semblant, utilisent la monnaie, comptent, écrivent et apprennent. Les objets sont rarement détournés ou abîmés. Bien au contraire, gare à celui qui range mal les petits gâteaux, les lunettes ou les billets ! Pour éviter la lassitude et surtout apporter une progression dans les apprentissages, les scénarios sont régulièrement changés au cours de l’année. Voilà. Si ça peut inspirer quelqu’un. Ps : Sachez que je ne fais de pub pour personne. Je ne connais même pas cette enseignante.


#8

J’ajoute à cette discussion un exemple que je trouve intéressant concernant les jeux symboliques. Ma collègue de PS/MS avait un coin poupée, et elle s’en servait notamment pour travailler sur le schéma corporel, en faisant prendre le bain du bébé. Certes, les bébés étaient en plastique, mais on ne peut pas en prendre des vrais… :wink:
Et je trouvais intéressant que des petits garçons puissent s’approprier ce coin alors que, souvent, ils ne peuvent pas le faire chez eux (tout comme le coin bijoux, d’ailleurs, que j’ai vu accaparé par des petits garçons dans une classe de MS/GS, ou le coin voiture qui peut être utilisé par les petites filles).
Donc, effectivement, les jeux symboliques ne sont pas une obligation (je n’en ai jamais eu dans ma classe de GS/CP), mais ils peuvent quand même avoir un intérêt, surtout pour les plus jeunes enfants, en fonction de ce que l’on en fait réellement. Le témoignage de mamsylvie en est un bel exemple.


#9

Merci pour votre réponse. J’ai retrouvé la vidéo, c’est la numéro 11.
Je me souviens également de la critique concernant le “détournement” d’objets. Mais parfois, je suis sceptique, car cela n’induit-il pas aussi de faire preuve d’imagination et de créativité?


#10

Merci pour votre réaction. J’adore le NB que je ne manquerai pas de ressortir :wink:


#11

Merci pour votre intervention et pour cette chouette idée.


#12

Je viens juste de sortir d’une super réunion avec des collègues où nous avons travaillé sur les explorations du matériel de développement sensoriel. Je pense que ça rejoint le questionnement relatif à la créativité et à l’imaginaire. J’avais déjà vu quelques modèles sur le net (par exemple des dispositions différentes de la tour rose; ou utiliser les cylindres de couleurs dans les encastrements cylindriques), mais cela va beaucoup plus loin que ça. Il faut par contre (on est en Montessori) que ce soit réalisé avec une intention d’exploration sensorielle (équilibre, mesures, poids, couleurs, …) ou une création (représenter, faire passer une idée, une émotion, … on arrive sur de l’art). Par opposition à une décharge émotionnelle, un défouloir (là je vois mes élèves qui font se battre les animaux de la ferme, ceux qui cherchent juste à empiler n’importe quel matériel pour le faire tomber, tape des éléments ensemble, etc.) Cela implique donc que les compétences exécutives des enfants soient déjà bien en place, et que le matériel utilisé ait été présenté. Et souvent il faudra initier l’exploration : je pense que la plupart d’entre nous ont plutôt eu tendance à être assez contraignant vis-à-vis de l’utilisation du matériel :wink: Ce qui d’ailleurs est tout à fait normal pour les autres aires, notamment la vie pratique qui est vue avant.


#13

C’est une réflexion que je me fais depuis un moment, pas uniquement sur les jeux symboliques, mais sur les jeux en général. Les ateliers type Montessori, même si certains se font à deux, même si dans l’organisation de la classe l’entraide est toujours la bienvenue, sont dans l’ensemble construits pour être utilisés une personne à la fois, et en ayant besoin de rien d’autre. C’est ce qui fait leur force, ils encouragent à l’autonomie, et permettent à l’apprentissage de ne pas se faire envahir par le social. Et lors de ma première année où je n’avais que des petites sections, je les trouvais très adaptés. Mais dès ma deuxième année avec ce fonctionnement, les PS étaient devenus des MS, les élèves avaient grandis, et connaissaient parfaitement le fonctionnement de la classe, ils savaient ce qu’ils voulaient apprendre, n’hésitaient pas à me le demander, ils étaient à peu près dans la démarche d’apprentissage vers laquelle je souhaitais les amener, mais j’ai remarqué à quel point les coins jeux (chez moi, c’est puzzle, jeux de construction surtout, quelques jeux de cartes) et dessin étaient sur-utilisés. En gros, ils font des ateliers avec moi, travaillent un peu avec quelques ateliers autonomes, et tout le reste de la journée sont en groupe à faire des jeux. Moi, j’interprète ça à la fois comme le besoin de faire quelque chose ensemble, et celui de faire des choses plus complexes que les ateliers Montessori (complexe dans le sens “utiliser plusieurs compétences à la fois”).
C’est pour ça qu’en ce moment je me re-penche sur les jeux symboliques notamment, ou d’autres jeux, en me demandant si une organisation de l’apprentissage type : “Volonté d’apprentissage=> acquisition de la compétence grâce aux ateliers autonomes => renforcement de la compétence dans un environnement complexe qu’est un jeu” serait fructueuse, voir vertueuse.
Quand je parle de “jeux symboliques” je pense surtout au jeu du marché qui permettrait d’utiliser diverses compétences mathématiques (compter, additionner, soustraire, multiplier), ou tout autre jeu évoquant un métier avec des compétences propres à ce métier.
Je vais regarder ce que fait maîtresse Mélanie dont parle Mamsylvie, parce que ça m’a l’air très intéressant ces espaces à scénario.
Pour le moment, ce ne sont que des questions que je me pose, je n’ai rien mis en place dans ma classe.


#14

Le matériel de développement sensoriel est très adapté pour travailler à 2 ou plus. Que ce soit pour les mises à distances (un.e qui demande, l’autre qui va chercher), pour l’exploration (à 2 on a plus d’idées), pour les discussions & (in)validations.
Ceci étant dit, le matériel n’est qu’une porte d’entrée. Donc en effet, proposer d’autres ateliers, d’autres explorations vers l’extérieur, vers des taches réelles, est idéalement ce qu’on devrait faire (j’en suis encore loin).


#15

Il me semble que dans la pédagogie Montessori, les présentations du matériel se font en individuel en maternelle et en groupe en élémentaire, et que le matériel est destiné au départ à une utilisation en individuel en maternelle et en groupe en élémentaire, voire à deux élèves en maternelle mais pas plus. En revanche, paradoxalement, je trouve que les enfants de maternelle aiment être avec les autres et cela se passe plutôt bien en général, alors que les enfants en élémentaire ont du mal à faire les activités en groupe, se disputent beaucoup, mais c’est peut-être parce que dans les écoles classiques, on ne leur apprend pas à travailler en groupe et que l’esprit de compétition est déjà bien installée.
J’aime bien l’idée d’Evoli : apprendre à être autonome et apprendre à apprendre, puis acquérir les connaissances et compétences avec le matériel Montessori, puis le réinvestir dans des jeux ou consolider les compétences en contexte (si je traduis bien l’idée). Je m’intéresse moi-même aux jeux de société qui utilisent des compétences “scolaires”. Je trouve qu’ils sont intéressants parce que les élèves utilisent leurs connaissances/compétences pour arriver à un objectif, il y a une motivation donc une attention, une planification… et ils aiment jouer, donc cela me paraît quand même pas mal.
Ce ne sont que mes réflexions du moment, étant en dispo, je n’ai encore rien mis en pratique.


#16

Les présentations (la plupart), oui se font en individuel.
Mais ensuite, ils peuvent (et le font souvent) travailler à 2. Certaines activités, s’y prêtent particulièrement bien. D’autres sont plus intéressantes à 2. Et d’autres encore se font nécessairement seul (je dirai la majorité de la vie pratique - surtout lorsque l’enfant en est à construire ses fonctions exécutives) .