Résister


#1

Je me suis lancée cette année et j’étais tellement convaincue que je ne m’attendais à rencontrer une difficulté particulière : tenir bon face aux collègues qui travaillent de manière traditionnelle. Mes collègues sont adorables et ne se posent jamais en juges. Mais quand je passe devant leurs classes, que je vois le calme qui règne, quand je vois les productions des enfants, quand je vois leurs classeurs pleins de fiches, leurs progressions bien suivies, etc, et bien j’avoue, je me dis que peut-être je fais fausse route, qu’elles font mille fois mieux que moi, je ne me sens pas à la hauteur.
Pourtant, je suis toujours convaincue, j’y crois vraiment, mais c’est dur d’avancer seule. J’ai parfois l’impression de ne pas avoir vu certains élèves depuis plusieurs semaines, ça me culpabilise, mais je n’y arrive pas, ils sont 30, je suis seule, mon atsem ne connaît rien à cette pédagogie.

Bref, avez-vous ressenti cela?


#2

Je ne vais pas être rassurante, mais je ressens aussi la même chose, même au bout de la troisième année. Du bruit, des enfants qui tapent et des pleurs le matin avec les PS. C’est mieux l’après-midi quand je n’ai que les MS GS. L’atsem est fatiguée, elle les trouve “difficiles”, elle essaie de m’aider, elle fait des présentations d’activités “vie pratique, vie sensorielle”. Je n’arrive pas à voir régulièrement certains enfants ou à les intéresser sur des activités pour les faire progresser.
Je vois des comptes instagram des collègues qui font faire des choses magnifiques aux enfants, ça donne envie. J’ai testé le dispositif “apprentilangue” https://apprentilangue.jimdo.com/ pour améliorer le vocabulaire et systématiser l’apprentissage du son des lettres. J’aimerai utiliser ce dispositif pour inciter à créer des phrases. Ce dispositif m’a obligé à ne regrouper que les PS, tous les jours, ça les a aidé à se poser.
J’ai mis en place un coin facteur https://www.instagram.com/p/CaBi1_SKG-L/, pour les inciter à écrire régulièrement (cet espace est très utilisé depuis février).
Je n’aurai que des PS MS l’an prochain. L’équilibre est déjà très fragile en triple niveau, je crains que cela fonctionne moins bien en double niveau. Je ne sais pas si il faudra que je fasse davantage de travail en groupe ou si je dois faire des plans de travail (en PS ça me semble impossible).
Voilà, si certains ont des pistes pour améliorer cette pratique, que je trouve magnifique chez les autres, je suis preneuse.
Bon week-end.


#3

Il me semble important de relativiser ce que l’on découvre sur les réseaux sociaux. Cela peut être à la fois source d’inspiration et c’est super. Maintenant cela reste un prisme, un choix de ce que l’on va montrer. Si cela devient angoissant et culpabilisant alors il faut résister et ne plus surfer sur ces sites pendant quelques temps. Les gens qui postent, postent rarement leurs ratés, leurs journées de m****, les photos ne rendent pas le niveau sonore réel de la classe… PRUDENCE.
On le dit aussi pour tous ces sites de wonder maman qui gèrent tout de main de maitre, postent des photos splendides de bambins réjouis et nickel, de maison entretenue comme dans les magazines, de taille de guêpe deux mois après l’accouchement… Il faut bien savoir que du coup TOUT est CHOISI, bref, c’est du FAKE !
Allez courage. Ne pas se comparer aux autres. Faire toujours de son mieux. C’est déjà magnifique.


#4

Je rejoins pamiki, je dirais même plus: les vidéos de Céline Alvarez elle-même sont souvent filmées pendant la récré quand il faut du son, l’après-mid quand les petits sont à la sieste et avec une musique à la place du vrai fond sonore de la classe quand les gestes suffisent à illustrer le propos.
C’est très difficile parce qu’effectivement, quand on laisse les enfants retrouver leur motivation endogène, ça demande beaucoup plus de temps que de vouloir à leur place, ça donne une ambiance plus bruyante…
Je me suis sentie totalement dépassée pendant longtemps. Et puis, par un concours de circonstance, des conseillers municipaux sont venus passer un peu de temps dans ma classe. Ils ont été épatés par l’autonomie des enfants alors que moi, je ne vois que ce qui ne va pas. J’ai enfin compris que c’est comme pour tout: nos complexes nous font grossir à nos yeux des défauts que les autres ne voient pas. Cette méthode réveille de vieux complexes, surtout quand on est seule à la pratiquer (ce qui est mon cas): et si j’avais une mauvaise maitresse? Et si je manquais d’autorité? Et si “mes” futurs CP étaient moins bons que les futurs CP de la collègue l’an prochain? Et si je leur rendais un mauvais service en ne leur apprenant pas à rester assis, à obéir sans réfléchir? Dans ces cas-là, j’essaie de me souvenir d’une chose: pour beaucoup de parents, à la maternelle, on ne fait que jouer! Donc, pas de panique s’il n’y a pas beaucoup de feuilles dans le classeur! Pas de panique s’il ne sont pas assis sans bouger…
J’ai revu récemment une vidéo de Céline Alvarez (Formation Belgique, épisode sur comment commencer) qui rappelle que l’indicateur doit être le plaisir, de l’enseignant comme des élèves. Alors je fais plaisir aux élèves (surtout les petits, j’ai plus de mal à lâcher prise avec les grands) en les laissant manipuler les Number blocs qu’ils adorent alors que je ne les prêtais pas de peur qu’ils perdent des pièces. c’est beaucoup plus calme depuis!

Bon courage!


#5

"Ils ont été épatés par l’autonomie des enfants alors que moi, je ne vois que ce qui ne va pas. J’ai enfin compris que c’est comme pour tout: nos complexes nous font grossir à nos yeux des défauts que les autres ne voient pas."
C’est tellement ça, tout le temps.
Du coup la satisfaction (passagère, on ne se refait pas) quand une personne extérieure passe dans notre classe et remarque le calme (relatif - ce sont des enfants !), l’autonomie, le plaisir des élèves. Alors que nous sommes juste en plein stress parce qu’un élève n’a pas le comportement idéal que nous attendions ^^’ Toujours le même maitre mot à se répéter : “apprendre à lâcher prise”.