Bonjour à tous,
L’année dernière j’étais en année 0, avec tout le matériel montessori mais à mi-temps. Cette année, j’ai repris à temps plein et modifié pas mal de choses ce qui me laisse de l’espoir quant à ce qui pourrait se passer dans quelques mois (j’ai 27 enfants de moyenne section).
L’année 0 a été très éprouvante, mettons de côté le mi-temps, car il y a eu un gouffre entre les vidéos de Gennevilliers et ce qui pouvait se passer dans ma classe. L’expérience m’a toutefois permis de constater que mes élèves avaient développé des compétences sociales extraordinaires pour leur âge : l’entraide était permanente, il y avait très peu de conflits entre les enfants, ils ont acquis une grande confiance en eux, ils étaient très bienveillants les uns envers les autres. Je dois aussi admettre qu’ils ont acquis une belle ouverture d’esprit et une curiosité insatiable pour tout. Ils étaient heureux chaque matin en venant à l’école et cela ne s’est pas démenti pendant l’année. Par contre, d’un point de vue des apprentissages stricts, les résultats ont été décevants car j’ai eu du mal à trouver la bonne posture, à lâcher prise et à prioriser, à m’organiser dans les présentations. Ils ont donc acquis les compétences de moyenne section mais pour la majorité d’entre eux ne sont pas allés au-delà. J’avais mis en place un cahier de réussites individuel et rempli par les élèves eux-mêmes. Bien qu’ils l’aient eu facilement en main (photos uniquement et gommettes en cas de réussite) cela ne m’a pas satisfait : trop lourd à gérer, des élèves qui valident parfois des compétences alors qu’elles ne le sont pas en réalité, une course aux gommettes et des enfants. C’était comme un catalogue du matériel de la classe alors ils aimaient prendre celui qui leur faisait envie et non celui qui correspondait à leur besoin réel.
J’ai passé l’année 0 à changer le plan de classe, à lire et relire les écrits de Maria Montessori, à réécouter en boucle les vidéos de la session de formation de Céline qui a eu lieu à l’été 2015. Je me suis chaque jour posé des questions bien souvent sans trouver les réponses appropriées au sein de ma classe. Et puis, j’ai relevé une phrase de Céline : “Si vous entrez dans ce processus, c’est vous tout entier, votre mode vie, le regard que vous portez sur le monde qui vous entoure qui va changer.” et puis elle a aussi dit “Apprenez à prendre soin de vous et vous prendrez soin d’eux” (enfin quelque chose comme ça). Alors, cet été j’ai beaucoup cogité là-dessus et j’ai décidé de LACHER PRISE mais pour de vrai cette fois J’ai décidé de regarder le monde avec un œil nouveau, beaucoup plus tolérant et plus confiant en l’Homme. Je ne dis pas que cela a permis de transformer cette rentrée en véritable bonheur mais cela me permet de me régaler des petits bonheurs que j’observe quotidiennement dans ma classe, d’accepter d’être sur un chemin long et de rester sereine face à ces petits loulous qui débordent parfois. Autres choses aide énormément : l’organisation, la rigueur matérielle et une asem en or (oui, ça ça ne s’invente pas )
Pour l’instant ma classe ressemble à ça : 27 loulous plein de vie qui sont calmes et appliqués jusqu’à 9H45 (on rentre à 8H05), nous sommes alors en travail libre (nom que je donne à cette manière de travailler). 9H45, il faut ranger et préparer tout le monde pour le respect du sacrosaint goûter et de la récréation…Et bien après 30 minutes de courses poursuites, d’angoisses dans cette cour immense (il y a 750 élèves dans l’école) et bien je dirai que ma matinée est terminée ! Cette récréation casse complètement un cycle d’apprentissage efficace. S’ensuivent ensuite un autre créneau de 45 minutes de travail libre, puis une récréation de 15 minutes (qui coupe encore un peu plus cette matinée saucissonnée), et enfin un créneau de 40 minutes sur lequel je fais sport (je pense que ce créneau de sport est important et qu’il est complémentaire du travail libre, en bonne adepte de l’USEP je trouve que les enfants y développent coopération et esprit d’initiative dans un contexte différent de la classe). Ensuite, nous avons la cantine. Autant dire que ce deuxième créneau de 45 minutes de travail libre est totalement inefficace. Je n’arrive pas à me résoudre à le retirer.
L’après-midi, certains dorment, les autres poursuivent dans la classe le travail libre (pendant 1H15), après une année d’expérience je trouve que c’est à ce moment de la journée que les enfants sont les plus productifs et efficaces. Nous avons ensuite de nouveau une récréation (qui est bienvenue celle-là) et il reste 30 minutes pour faire un bilan de la journée et lire une histoire, écouter de la musique (ou la radio : radio Pomme d’api ils adorent ça:) ) .
Après 10 jours de classe, le bazar règnent donc essentiellement de 10H à 12H. Point important, contrairement à l’an dernier où je n’avais pas voulu prendre le temps de préparer mes élèves en début d’année à travailler en leur offrant essentiellement les activités de vie pratique et de vie sensorielle, et bien cette année je me l’autorise (je n’ai mis en plus que les lettres rugueuses, les chiffres rugueux et l’escalier de perles, ainsi que la bibliothèque). Nous voyons avec mon asem que les enfants ont déjà presque tous progressé dans l’ordre et la maitrise du geste. Reste à gérer ceux qui n’arrivent pas encore à se poser : ils représentent 9 élèves sur 27 ! Bref, un gros travail !!! Mais je leur laisse du temps, essayant en attendant de limiter la casse…
Le mercredi matin est consacré aux sciences expérimentales (1H seulement de travail libre) et le vendredi matin à la pratique artistique.
Les élèves donnent l’impression en ce début d’année de papillonner d’activité en activité sans jamais réellement se poser. Ca c’est l’impression que l’on a lorsque l’on ne lâche pas prise 5 minutes sur les oppressantes demandes des enfants pour OBSERVER. Je ne me l’autorisais pas non plus l’année dernière, quelle erreur ! Maintenant, je leur dis : “Non, je ne suis pas disponible. Là, tu vois, je regarde, je vous regarde pour mieux vous aider et mieux t’aider ensuite.” Et bien, lorsque l’on prend ce temps d’observation, on s’aperçoit que la situation n’est pas si catastrophique et qu’une partie non négligeable de la classe est occupée à une activité intelligente et ordonnée. Après cette respiration, on peut prendre par la main l’agitateur et lui accorder du temps pour une présentation “Viens avec moi, j’ai quelque chose de formidable à te montrer…On va trouver quelque chose qui t’intéresse.”
Aujourd’hui, j’ai bien besoin d’une sorte de mentor qui puisse venir m’observer en classe et corriger mon attitude, me guider dans les meilleurs choix à faire pour tel ou tel élève. Je ne l’ai pas encore trouvé là où je suis alors je me forme maintenant à la communication non violente et à d’autres façons de poser son regard sur l’autre en espérant que cela me permette d’apaiser toujours un peu plus ma classe. Je suis persuadée que lorsque ça ne marche pas c’est parce que Nous, enseignant (je n’aime pas trop ce mot) marchons de travers.
Le chemin ouvert par Céline est long et difficile mais tellement beau. Les premiers mois sont éprouvants et chaotiques, il faut alors prendre soin de soi et être la meilleure oreille pour ces enfants. Il faut accepter qu’il faille du temps pour déconstruire ce qui a été mal bâti pendant 4 ans;)
Tenez bon, courage !