Garder les mêmes activités plusieurs années ou les faire évoluer ?


#1

Je commence par mon propre témoignage pour lancer le sujet.

J’ai une classe multiniveaux, de 2 à 5 ans, dans une école de village à trois classes. Mon effectif cette année est relativement chargée, 26 élèves tous les matins, 24 l’après-midi, 3 de plus à la Toussaint, 2 supplémentaires à Noël. C’est un des paramètres, avec la lecture du livre de Céline Alvarez, et mon approche pédagogique qui rejoignait déjà de façon informelle cette vision de l’enfant, qui m’a fait entrer dans cette démarche. J’ai cependant grandement adapté la démarche mis en place à Gennevillier à ma classe, à mon matériel, et mon approche. Voici comment, et mes interrogations.

Afin de les relier au réel, j’ai introduit les premières activités pratiques par des rencontres de commerçants du village. La coiffeuse par exemple nous a montré comment tresser les cheveux, mon Atsem s’est prêté au jeu. Et de retour en classe nous avons mis en place un atelier tressage avec de la laine, et réalisé un tête à coiffer. La coiffeuse nous a montré également comment elle tenait ses ciseaux de coiffure, à la différences de ciseaux de couture ou de découpage. Puis j’ai mis en place l’atelier de découpage. De même avec le boulanger qui nous a fait façonner des baguettes, ce que nous refaisons en pâte à modeler. Puis l’épicière pour l’activité marchande. La cuisinière pour la tenue d’un couteau. L’Atsem pour essorer une éponge. L’employé municipal pour dérouler un lai de lino…
Avec le recul, cette démarche m’a permis surtout de me rassurer pour me lancer et présenter l’approche aux parents. Pour les élèves, elle a l’avantage de leur faire connaître les adultes de l’école et du village.

Cependant, je n’ai pas l’impression que les activités ainsi présentées prennent plus de sens pour eux que d’autres activités que j’ai pu mettre en place par la suite sans passer par là, et qui pour certaines fonctionnent bien aussi. Mon soucis est de faire durer les activités, éviter les effets de modes passagers, et d’éviter de se disperser. Je reste toutefois dubitatif quant aux quelques activités limitées mises en place par Céline Alvarez dans sa classe sur un an, deux, trois ou quatre ans que dure la scolarité d’un élève. J’ai peur qu’ils ne se lassent. Et je sais personnellement que je vais être tenté de les faire évoluer, de renouveler, ne serait-ce que par curiosité professionnelle.

Qu’en pensez vous ? J’ouvre là un débat, des questions que vous vous poser peut-être. Je serais curieux d’avoir vos avis.

A bientôt pour d’autres questions qui me taraudent. Cordialement.


#2

Je pense aussi que se limiter à quelques activités pratiques laissent les enfants plus grands un peu sur leur faim. Celine Alvarez l’a d’ailleurs, il me semble, constaté aussi et suggérait de mettre en place pour les grands des activités complexes, par exemple de bricolage et de couture.
Pour ma part j’ai des TPS PS et MS et je suis en autonomie depuis l’année dernière.
J’ai mis en place la plupart des activités pratiques de Gennevillers mais j’ai aussi ajouté du tissage et des petits bricolages au gré des saisons et des événements qui ponctuent classiquement l’année en maternelle (Noël, fête de mères, des pères, carnaval etc…) et aussi sans rapport avec le calendrier. Ces bricolages étaient proposés mais bien sûr non imposés, les enfants pouvaient aussi les réaliser plusieurs fois. Pour Noël par exemple j’ai proposé de réaliser des étoiles en laine et carton , un de mes moyens en a fait une dizaines, un autre n’a pas du tout été intéressé…la plupart en ont réalisées entre 1 et 4…
Par contre, pour les petits je pense que les activités proposées suffisent à la plupart des enfants qui s’exercent inlassablement notamment sur les plus complexes (laver le linge, le tableau, la table…).


#3

J’ai des plus grands (CP CE1) et clairement à cet âge du moins ils ont besoin de nouveautés, je ne me verrais pas laisser les mêmes activités toute l’année et encore moins plusieurs années!!

L’an dernier j’ai mis en place progressivement les choses donc au fur et à mesure forcément ils ont eu des nouveautés, cette année j’ai vu que certains avaient déjà fait bcp d’ateliers plusieurs fois (je ne parle que des ateliers artistiques/vie pratique) et commençaient à se lasser, du coup j’ai sorti de nouveaux ateliers!
L’ an dernier c’était la fête à chaque nouveauté!!


#4

Effectivement, c’est bien de proposer des activités pratiques complexes (dans ma classe c’est “prendre soin des plantes”, “le canevas”, “les perles à repasser”, “la couture” et les “origamis”) et également des ateliers collectifs d’activités plastiques ou autour de la matière et des objets (invitations Reggio, bricolages saisonniers, activités plastiques avec plusieurs médiums et outils, etc…).
MAIS…je trouve que dans ma classe (de PS/MS/GS) ce qui pousse aussi à aller explorer le langage, les mathématiques, la géométrie et la géographie c’est qu’on a fait un peu le tour du reste…

Je trouve que c’est lorsque je mets sans cesse de nouvelles activités que je crée des “effets de mode” et éloigne les enfants des activités moins “attrayantes” de prime abord.
Qu’en pensez-vous ?


#5

Je suis tout à fait d’accord. Cela les amènent à découvrir des activités auxquelles ils n’avaient pas encore porté d’intérêt. Et puis l’ennui est le berceau de la créativité. Je trouve que c’est quand les enfants pensent avoir fait le tour d’une activité qu’ils deviennent les plus créatifs. C’est valable pour les arts plastiques comme pour le reste. Alors à ce moment l’utilisation n’est plus superficielle. C’est aussi dans ces moments que les enfants mettent en rapport deux activités, les mélangent pour en créer une troisième. Ou bien ils poussent le perfectionnisme au delà de leur limite (d’énormes constructions en kapla ou légos par exemple, très minutieuses; ou encore la création de petits livres de plus en plus élaborés ou se mélangent écriture et illustration).
Il faut aussi prendre en compte le fait que d’année en année, les enfants abordent une même activité avec un regard différent; ils ont une posture et un rôle différent dans la classe selon qu’ils sont parmi les plus jeunes ou les plus vieux.


#6

Oui c’est vrai ce que vous dites, je le constate à la maison avec mes enfants ( par exemple mon fils ayant lu toutes les bd va “devoir” lire autre chose du coup, alors qu’à la base il ne se serait pas forcé!)


#7

Je suis tout à fait d’accord avec @malikad, néanmoins j’aime à chaque vacance faire de petits changements :

  • changer les livres de la bibliothèque
  • changer les puzzles (je reste sur les mêmes niveaux de difficulté, seuls les dessins changent)
  • changer les graines dans mes pots de vie pratique
  • changer les petits objets de la boîte de sons et du sac à mystère…

J’y trouve plusieurs intérêts :

  • pour la bibliothèque : garder ce lieu attractif
  • pour les puzzles et les transvasements : comme les niveaux de difficulté n’évoluent pas, ceux qui savaient déjà les faire seront heureux de réussir les nouveaux rapidement (=> estime d’eux-même) et n’y passeront pas trop de temps, ceux qui n’y arrivaient pas auront tout le loisir de s’entrainer
  • pour les petits objets : même chose mais en plus je présente les nouveaux objets collectivement ce qui permet d’apporter du vocabulaire, de susciter des envies chez les élèves qui ne s’y étaient pas encore intéressé (dans ce cas présentation individuelle ensuite).
  • comme je mets en place ma classe petit à petit en apportant un nouvel atelier de temps en temps (en fonction des finances de la classe ou de mes constructions durant les vacances) cela évite l’effet 29 élèves pour un seul nouveau jeu…