Nous sommes depuis peu à l’étranger. Comme mon aîné a des problèmes d’appprentissage et que je ne travaille pas, on a décidé de tenter l’instruction en famille (IEF). Ma 2ème (GS) a toujours été motivée pour apprendre et apprenait avec facilité et plaisir. Je pensais donc m’inspirer du travail de Céline (même si j’ai compris qu’en dehors d’une classe c’est différent) et j’espérais qu’en lui proposant des ateliers autonomes, elle les ferait avec plaisir, voire qu’elle motiverait son frère pour les apprentissages.
Et j’ai l’impression que c’est l’inverse qui se passe. Au début elle était ravie, je lui ai présenté les lettres rugueuses, qu’elle a retenu avec facilité et repris d’elle même, elle avait un grand sourire quand je lui ai montré qu’on pouvait composer des mots avec les lettres. Et
elle passait du temps sur les activité et les réclamait. Maintenant elle zappe très vite : par ex elle veut faire un coloriage, colorie 3 cases et dit qu’elle en a assez. Elle va chercher l’alphabet mobile avec la boîte d’objets mais joue avec les objets au lieu d’essayer d’écrire. Du coup on peut passer 30 min sur un mot (elle y arrive quand elle prononce le mot à haute voix mais des fois elle ne veut pas). Et surtout j’ai l’impression qu’il n’y a plus le plaisir qu’il y avait avant. Pourtant j’ai l’impression qu’elle aimerait lire : elle prend les livres de son frère ou des magazines à nous, connaît des passages de ses livres par coeur et nous dit qu’elle lit. Mais elle ne fait peut être pas le lien entre l’alphabet mobile et la lecture.
Elle reprend peu les activités sensorielles à disposition et j’ai l’impression qu’elle passe moins de temps sur des activités type vie pratique que quand elle avait 3 ans. Et si je la laisse en autonomie totale, elle joue avec ses poupées ou personnages et ne choisit aucune autre activité. Au début elle réclamait ses cahiers d’activités (habituée à travailler sur fiche) mais maintenant plus du tout et ne semble pas s’intéresser aux formes à dessin ou au poinçonnage. Ca m’inquiète pour l’écriture dans la perspective du CP.
Du coup j’ai tendance à m’énerver, pas parce qu’elle n’y arrive pas mais parce qu’elle papillonne. Et je commence à culpabiliser et à me dire que mon idée de m’inspirer des lois naturelles de l’enfant n’était pas la bonne, que je m’y prend mal et qu’elle serait mieux dans une classe à fonctionnement traditionnel (mais elle s’en plaignait en début de GS alors qu’en PS et MS elle avait des maîtresses favorisant l’autonomie même si c’était sans le matériel montessori).
Merci d’avance pour vos précieux conseils et idées.
Problème de motivation intrinsèque ?
Tout dépend de ta capacité à lâcher prise. Un enfant qui papillonne apprend si son environnement est riche.
A toi d’accompagner, de fournir à la demande. Patience et confiance. Tu as souhaité placer des repères qu’elle a utilisés. Elle y reviendra le temps voulu ou elle te poussera à te réinventer.
C’est tout un positionnement. Le travail formel, imposé par l’adulte semble productif mais l’enthousiasme et la motivation de l’enfant s’éteignent et cela devient contre-productif et même destructeur.
Si tu veilles à ce que son environnement fournisse les occasions, allume les étincelles, tout se fera mais différemment.
Courage! … et surtout confiance! En fait, le processus principal d’apprentissage des enfants reste l’imprégnation et l’imitation: votre fille ne se trouve pas au milieu d’une classe composée d’enfants qui font toutes ces activités dont vous parlez. Elle va plutôt s’imprégner de ce que sont et font les adultes et autres personnes autour d’elle.
Cela reste du domaine des lois naturelles de l’enfant, bien sûr! Mais le contexte n’est pas celui d’une classe. Vivez, passionnez-vous, expérimenter, créer, lisez… et vous verrez une petite qui va vivre, se passionner, expérimenter, créer, lire… le tout à sa façon et à son rythme…
Merci pour vos retours.
J’ai l’impression que vous faites référence aux apprentissages autonomes. J’ai lu sur ce sujet et discuté avec des familles en IEF. Ca me semble envisageable sur du long terme, mais notre fille retournera à l’école l’année prochaine. Je sais que le CP commence par des évaluations et qu’il y a des attendus. Je ne voudrais pas qu’elle se sente mal à l’aise dès le début de l’école élémentaire parce qu’elle ne saura pas faire des choses que les autres maîtriseront, ni que les autres élèves se moquent d’elle.
Je suis bien consciente que la situation n’est pas la même que dans une classe et je crois que c’est l’apprentissage par imitation qui pose problème : son seul modèle à imiter est son frère, qui a des difficultés d’'apprentissage et est plutôt en refus de tout ce qui est scolaire. Et j’ai l’impression qu’elle a tendance à l’imiter. J’espérais que son envie d’apprendre aiderait son aîné à aller vers les apprentissages et c’est l’inverse qui se produit.
Et ça ne concerne pas que les apprentissages. Elle veut souvent que je l’habille et dit qu’elle n’y arrive pas, alors qu’elle sait s’habiller seule depuis longtemps.
Je précise aussi que les activités de type apprentissage formel sont limitées au matin, maximum 2
heures par jour, et qu’elle a donc le reste de la journée pour des jeux libres.
Passez-vous plus de temps avec son frère du fait de ses difficultés d’apprentissage? Il se peut dans ce cas qu’elle ait juste envie d’être au plus près de vous, d’avoir votre attention plus longtemps.
En effet mon approche s’apparentait aux apprentissages autonomes mais pas que
Il est courant de penser que suivre l’intérêt de l’enfant crée du retard par rapport aux attendus scolaires. Cependant, ce n’est pas un vérité et encore moins une fatalité.
Nous avons même observé tout l’inverse !
Nos enfants ont tous eu un attrait pour la lecture entre 2 ans et demi et 4 ans.
En écriture, ils se sont intéressés au tracé de la cursive entre 4 et 5 ans.
Pour compter, dénombrer, c’était entre 2 et 3 ans. L’association nom-signe vers 3 ans.
Finalement, ils ont toujours été très à l’aise pour les évaluations que je proposais parfois en amont d’un contrôle pour les préparer.
Bref, pour une future entrée au CP, du temps quotidien pour la lecture, des jeux et activités en maths qui se mêlent souvent aux jeux naturels de l’enfant ou aux activités familiales, un peu de graphisme à dispatcher sous forme de dessins, décalages, “repassages” ou en proposant un coin d’expression libre tout simplement. Et vivre des expériences !
Le risque pour l’année prochaine aurait plutôt été l’ennui pour les nôtres.
Ce qui est beau dans l’approche décrite ici c’est de permettre à l’enfant de faire seul, à son rythme grâce à une préparation de l’environnement pensée et précise. Laisser faire ne signifie pas ne rien faire.
Bon courage
Merci à tous pour vos commentaires et suggestions.
@ABC : ce qui m’inquiète c’est que justement, j’observais un intérêt spontané de ma fille pour certaines activités les 2 années précédentes et que je l’observe beaucoup moins cette année. Par exemple, l’année dernière elle comptait un peu tout et j’ai installé une frise numérique jusqu’à 100 quand elle a compté jusqu’à environ 30 avec le calendrier. Dès qu’elle l’a vu elle s’est mise à compter, sans même que je lui parle de cette frise, et elle a su compter jusqu’à 100 à son rythme. Cette année j’ai affiché une frise qui va plus loin, elle l’a vu mais elle ne s’y intéresse pas et n’a compté qu’une fois, en s’arrêtant à 100.
Ceci dit, j’ai observé récemment de l’intérêt spontané pour des apprentissages, ce qui me rassure.
Et je crois qu’elle n’accrochait pas du tout avec l’alphabet mobile. Elle ne voyait peut-être pas le lien avec la lecture ni avec l’écriture. J’ai quand même essayé les mots secrets, et elle aime et en redemande !
Je suis d’accord pour le lâcher prise, mais ça n’est pas évident avec la perspective du CP l’année prochaine. On a gardé le contact avec son école et ils ont fait des lignes d’écriture en cursive de toutes les lettres, alors que ma fille n’a pas envie de tracer les lettres, même dans la semoule.
Écrire c’est communiquer. Ici, nos enfants jouent au facteur et s’écrivent des messages. L’un de mes enfants s’est mis à écrire ce qu’il voulait manger (jeu du restaurant et de la commande aussi) ou ils écrivent ce qu’ils aimeraient faire (ils ont une enveloppe pour leurs envies). Certains enfants aiment recopier. Peut-être qu’il lui faut une activité qui fait sens.
Merci beaucoup @ABC pour tes commentaires.
"Laisser faire ne signifie pas ne rien faire."
Cette phrase résume bien ma problématique.
Quel équilibre entre les apprentissages autonomes (ou unschooling) et la préparation de l’adulte ?
Je suis un peu perdue entre l’approche de Céline Alvarez et celle de André Stern par exemple. Je n’arrive pas à faire la jonction entre les deux.
Faut-il imposer aux enfants des “présentations” , ou peut-être juste avoir du matériel sous la main pour quand enfin il s’y intéressera ?
Ici c’est plus ta deuxième option, j’ai en réserve et je sors quand c’est opportun ou parfois les enfants se servent !
C’est comme un fil directeur disponible à tout moment. J’essaie d’anticiper pour être prête et sinon c’est énormément d’improvisation.
Il me semble qu’André Stern prône le fait de faire participer l’enfant à la vie de sa famille (quotidienne, culturelle, sociale) et que c’est ainsi que l’enfant trouvera tout ce dont il a besoin d’apprendre.
Tout cela est bien beau lorsque nos parents fréquentent des artistes, intellectuels… Qu’il y a France Culture ou Bach en fond dans le salon. Et encore, cela n’en fait-il pas des personnes qui pensent que c’est cela La Culture et qui ne reconnaissent pas celle du berger de haute montagne capable de nommer toute la faune et la flore de son environnement, de savoir lire dans le ciel si le temps va changer…
Voilà la différence entre mon approche d’enseignante du public (qui s’est appropriée à sa sauce celle de Céline Alvarez) et l’approche du unschooling.
Chaque enfant bénéficie de ce que son environnement lui apporte. La qualité du unschooling, si tant est que l’on puisse étiqueter de la sorte un processus aussi indéfinissable, comme celle de n’importe quel mode éducatif dépend de la diversité des possibilités qui s’offrent à l’enfant et de l’attention qu’on lui porte. Mais avant tout, ce qui caractérise le unschooling c’est l’unicité propre à l’enfant et à sa personnalité. Il apprend en vivant naturellement. C’est lui qui guide, l’adulte ne cloisonne pas, ne prépare pas à l’avance un chemin tout tracé. Il observe, écoute, accompagne, fournit, échange et partage. Ce mode éducatif sous-entend une grande réactivité pour suivre les méandres choisis par l’enfant et est sans limite. L’enfant papillonne et l’adulte est là pour répondre aux questions, expliquer, illustrer, nommer les choses…C’est ici que j’ai pu constater avec joie et espoir que certaines pratiques de classe pouvaient s’approcher de ce processus naturel d’apprentissage
Je ne pense pas que le unschooling soit limité, je pense qu’il n’est pas généralisable parce que toutes les familles ne possèdent pas un milieu suffisamment porteur.
Il suffit de voir ce qu’il se passe actuellement avec la continuité pédagogique. Malgré le travail acharné des enseignants qui passent énormément de temps devant les écrans et au téléphone pour accompagner au mieux les familles, les inégalités scolaires se creusent à cause des inégalités dans la capacité des familles à accompagner les enfants.
Et en fait si, je pense que le unschooling est limité. Il se heurte aux propres limites de l’adulte qui accompagne l’enfant. En fonction des familles, la limite sera plus ou moins éloignée. Mais pour parler trivialement, l’enfant n’entendra qu’un son de cloche, celui de sa famille et de son cercle de proches. Pour moi, l’école doit être un lieu d’ouverture.
Mais si vous souhaitez en discuter, je vous invite plutôt à poursuivre sur ce fil afin de ne pas faire trop de digressions dans ce sujet.
Sur ça je suis malheureusement d’accord. Tout le monde n’a pas cette compétence et c’est pour cela que l’on devrait inciter ceux qui le peuvent à le faire pour désengorger nos classes et nous permettre de travailler mieux auprès des enfants qui en ont besoin.
Oh non ! Ne m’enlevez pas les enfants des néos, ils apportent tellement aux autres et apprennent tant d’eux.
C’est sûr mais en même temps je suis toujours partagée, n’aurions-nous pas plus de temps à accorder à chacun et cela ne nous permettrait-il pas d’agir davantage sur les inégalités ?