Qu'en est-il de votre cour de récréation ?


#1

Bonjour,

Je suis encore étudiante, ayant pour volonté de devenir professeur des écoles. Pour le moment je suis en master et réalise un mémoire sur le thème de la cour de récréation.

J’ai créé un questionnaire à destination des enseignants pour mieux comprendre l’utilisation de la cour. Si vous êtes enseignant et que vous souhaitez contribuer à ma recherche, je vous laisse le lien de mon questionnaire :

Je vous remercie par avance !
Héloïse


#2

Bonsoir,
Bon courage pour la rédaction de ce mémoire.
Je pensais que ce post permettait aux enseignants de lister ce qu’ils avaient mis en place dans leur cour pour l’améliorer. Je suis en pleine réflexion pour l’amélioration de celle de mon école: elle est horrible; pas un arbre/arbuste/coin vert, une seule structure, des vélos, un bac à sable et un coin dinette. J’espère pouvoir mettre d’autres choses en place quand le protocole sanitaire aura changé et que l’on pourra mutualiser le matériel avec les autres classes. Je suis une formation EDD (anim péda) et j’aimerai pouvoir changer tout ça, avec un peu de patience…


#3

Voici un texte que j’avais écrit qui pourrait être lu en lien avec la coupure avec la nature * que nous faisons subir à nos élèves en les éduquant dans des locaux fermés et dans des cours bitumées sans arbres ni terre, espaces naturel pour leurs expériences sensorielles. C’est long mais je vous offre tout le passage

Le jeune enfant capte naturellement son environnement par ses sens. Il touche tout ce qui est à sa portée ; il attrape, tâte, pétrit, tord, malaxe. Il goûte tout ce qu’il peut porter à la bouche, sans distinction ni dégoût, en pleine confiance. Il est sensible aux odeurs ; il recherche beaucoup les odeurs corporelles, de sa mère, du lait, aigre. Il entend le moindre bruit. Des bruits de fond que l’on n’entend même plus vont attirer son attention : le vrombissement d’un petit insecte, les cris d’un oiseau. Il voit bien sûr. Mais c’est le sens que je place en dernier, volontairement. Car c’est celui que l’on sollicite le plus, et de loin, en tant qu’adulte. Oubliant que le nourrisson ne commence à voir, et encore pas bien, qu’après sa naissance. Alors que tous les autres sens ont été depuis des mois sollicités in utero.
Mais soudainement, dès la naissance, la majorité de ces sollicitations vont lui être retirées, interdites. Soit volontairement, dans un soucis hygiéniste. Soit du fait simplement du mode de vie que l’on mène. Nous sommes déconnectés de la nature. Et nous interdisons à nos enfants une reconnexion qu’ils auraient pourtant tendance à rechercher naturellement. Les enfants, tout comme Peppa Pig, aiment la boue ! Ils prennent plaisir à être dehors dans la nature. Normalement, ça commence par un N. Ou alors il faudra se poser la question, à quel âge sont-ils déjà dénaturés. Et est-ce définitif, irrémédiable ? Non, bien sûr. Un enfant est tellement malléable, il s’adapte à tout. Même à être élevé dans un environnement hors sol !

Car nous élevons des enfants hors sol. Si l’on tamponnait au front de nos chérubins le même code que l’on applique aux œufs, aucun d’entre eux serait estampillé 0 = oeufs de poules élevées en plein air (au moins 2,5m2 de terrain extérieur par poule) et nourries avec une alimentation biologique. Quelques chanceux sont bien nourris au bio, on y fait plus attention maintenant, du moins tant qu’ils sont tout jeunes. Mais le plein air, n’y pensons pas, ils sont si fragiles. Aucun donc ainsi pourraient même prétendre au code 1 = oeufs de poules élevées en plein air (au moins 2,5m2 de terrain extérieur par poule). La porte du poulailler est bien fermée chaque nuit, le loup pourrait les manger. La plupart serait plutôt classés 2 = oeufs de poules élevées au sol (élevage intensif en intérieur mais sans cage - max. 9 poules/m²). Beaucoup même seraient tamponnés avec un 3 = oeufs de poules élevées en cage ou en batterie (18 poules/m²). Mais la cage est nommé appartement pour l’élevage humain, ou parc pour les bébés. Et à l’école ? On pourra en discuter…

Quel bébé est encore laissé à crapahuter dans la terre, la boue, dans l’herbe, l’humus forestier ? Il pourra peut-être explorer le revêtement chimique du sol de la maison : parquet flottant, moquette, tapis de jeu. Ou dehors : gazon synthétique, résidus de goudron joliment colorés dans les parc pour enfants. Au mieux, il aura la chance d’explorer un gazon tondu à ras, sans biodiversité. Ou un espace bien délimité de parc urbain, bien entretenu, sans zone sauvage. Et ce à une heure bien définie évidemment. Nous leur offrons de pauvres livres à toucher, qui ont le mérite d’exister c’est vrai.

Alors qu’un monde s’offre à nos sens juste en trifouillant dans un sous-sol forestier. Le lichen qui gratte, la mousse toute douce, l’écorce parfois rugueuse parfois lisse, les aiguilles qui piquent, sans parler des bogues de châtaigne dans nos terres d’Ardèche. La limace molle et gluante, la coquille d’escargot dure et spiralée, la petite bête qui s’écrase et celle qui a une carapace. Les cailloux de toutes formes et couleurs, pas un ne se ressemble. La terre changeante selon qu’elle est sèche ou humide.

Quel enfant goûte encore ce qu’il trouve à terre ? J’ai eu la chance de grandir à la campagne. J’ai donc goûté comme tous les enfants de ferme aux crottes de biques. Jusqu’à trouver que ce n’était pas terrible. J’ai vite préféré les réglisses ! Mes parents me l’ont raconté, je n’en n’ai pas le souvenir, je devait avoir 2 ou 3 ans. Mais à l’époque j’y ai sans doute goûté sans retenue aucune, naturellement, et j’en suis pas peu fier. J’ai du avoir l’opportunité de goûter à plein d’autres choses merveilleuses je suppose. Ma mère faisait la cuisine sur la table à côté de nous, nous devions bien piocher… Comme ma fille qui croquait à pleines dents dans les tomates à l’âge où elle marchait à peine. Rien à voir avec les petits pots au goût standardisé. Merci maman. Continuons à explorer les cinq sens dont on prive trop souvent l’accès aux bébés.

L’odorat. Oublions. Notre monde est saturé de déodorants chimiques. Notre odorat est atrophié. Personnellement, je ne sens plus rien par moment. Mais parfois je deviens hypersensible, attentif à toutes les odeurs et un monde s’ouvre à moi. Il paraît que c’est ce qui arrive quand une femme est enceinte. Et je suppose que le jeune bébé est baigné aussi dans des odeurs corporelles. Le peau contre peau, en écharpe, calme souvent comme par magie le nourrisson angoissé. Car il doit sentir notre odeur, et entendre aussi notre respiration, notre cœur. De même pour nous, c’est un ressenti apaisant, l’impression de se confondre en symbiose avec le petit être serré contre nous. Une vague idée de ce que doit vivre plus intensément encore une femme quand elle porte un enfant en elle, le sent vivre, bouger dans son ventre. Puis quand elle l’allaite. Je ne suis pas en train d’idéaliser, je pourrais être juste un peu jaloux, et j’en suis conscient pour avoir accompagné ma compagne dans des moments difficiles. Et rappelons qu’à une époque de nombreuses femmes mourraient en couche. Mais sentir un enfant s’endormir contre soi, écouter sa respiration calmement, c’est juste un moment magique. Qu’ils sont mignons quand ils dorment… comme ma fille qui va maintenant aller se coucher car il est tard. Dodo. Au lit ma chérie !

Que c’est calme. Or dans de nombreuses familles, la télévision vomit ses débilités en continu, sans d’ailleurs que plus personne n’écoute vraiment, ni que personne ne prenne l’initiative d’éteindre le poste. C’est une présence à laquelle on s’habitue, mais une présence envahissante et abrutissante. De même, de nombreux appareils ménager ronronnent sans que l’on ne s’en rende plus compte. Des ronronnements, c’est une belle allégorie, je préfère ceux du chat. Et les bruits de voitures qui envahissent l’espace sonore presque partout. Bref, quand le jeune bébé a-t-il le luxe de se retrouver dans le calme, à écouter les sons naturels de son environnement ? Pourtant dans son jeune âge, le bébé sait être attentif au petits sons. Puis, comme son environnement sonore est pollué, il se déshabitue lui aussi. Il faut dire que nous l’aidons bien, avec des hochets électroniques au son pourri. Pour une éducation musicale, bravo. Prenons l’habitude d’écouter le silence, le chuchotement du monde. Murmurons des mots doux aux enfants. Mais nous en reparlerons plus tard dans un paragraphe sur la classe.

Finissons d’abord par un dernier sens, non des moindres puisque c’est celui qui prend le pas sur tous les autres. La vue. Les jeunes enfants sont sensibles aux mouvements doux. Le vent et le soleil qui font briller le feuillage de mille feux quand on regarde un arbre du dessous. La poésie du monde. Les nuages qui s’étirent et forment d’improbables paysages dans le ciel. Un coucher de soleil. Tout bébé en fait, ils vont être déjà attirés par le monde visible tout proche. Microcosmos. Le brun d’herbe qui se balance. La fourmi qui chemine. Une petite poussière. La nature qui nous entoure est changeante, mouvante, et diverse. Aucun petit caillou ne ressemble à un autre. L’observation, les petits détails, les changements lents, subtils, les couleurs composées, délicates. Voilà ce à quoi les cerveaux de nos enfants sont prédisposés, et diablement doués. Prêt d’un millier de connexions entre neurones s’établissent chaque seconde dans leur cerveau. Juste pour observer le monde. Et interagir par le langage, c’est le titre d’un nouveau chapitre.

Et que leur offrons nous à voir dans notre monde hors sol ? Des couleurs criardes primaires. Ah ils peuvent connaître le nom des couleurs en classe : bleu, rouge, jaune, vert, orange, violet, rose, marron… Et puis ? Chez les plus grands on distingue clair et foncé… Et encore ? Essayez dans la nature de nommer les couleurs, vous allez vite être limités dans le vocabulaire. Les Inuits ont plus de dix termes différents pour qualifier la couleur de la neige. En fait, le nom d’une couleur est une catégorie regroupant une large palette de teintes que l’on classe de façon consensuelle ensemble. Mais pour construire une catégorie, le sens d’un mot, l’enfant a besoin d’être confronté à un large panel d’exemples. On n’apprends pas juste le mot rouge en voyant une seule sorte de rouge. C’est pourtant ce à quoi nous les habituons. Regardez les jouets pour enfants. Tout identique, aucune diversité, des formes rectilignes ou bien rondes. Pas d’accrocs, d’imperfections. Visuellement, nous les faisons vivre dans un monde cubiste monochrome, à la Mondrian. C’est conceptuel. J’aime bien, mais pas que ! Le vrai monde est plus subtil. Prenez une pigne de pin, une feuille d’érable, un caillou… Rien n’est droit, ni d’une couleur uniforme.


#5

Je vous remercie et vous prie de m’excuser pour la fausse joie.
Je me permet de vous transmettre ce lien https://www.youtube.com/watch?v=7HVgpNUFqCM, qui vous renverra sur une chaine youtube. Un Webinaire en lien avec la cour de récréation a eu lieu hier et c’est le lien de sa rediffusion, si cela peut vous intéresser !


#6

Bonjour Florian, je vous remercie pour le partage de votre réflexion ! :slight_smile:


#7

Un lien vidéo sur l’aménagement avec les élèves de la cour de récré, suite à une formation ce matin avec l’OCCE sur les compétences psycho-sociales.


#8

Aucun problème, merci pour le lien!