Littérature, contes traditionnels


#21

Oui… C’est un peu l’impression que ça me donne si je croise mon expérience de Maman avec celle d’enseignante, et que je compare les profils de mes anciens élèves “impressionnables” alors ça+un contexte un peu inquiétant… ça fait vite monter la sauce :disappointed_relieved:

(moi aussi je parle de la version avec le renard -père castor- je ne connais pas l’autre :blush:)


#22

Et bien dans l’autre, c’est une poule qui trouve un grain de blé et veut le semer. Elle demande de l’aide à ses amis qui ont toujours quelque chose de mieux à faire ; “qui veut m’aider à semer ce blé ?” Pas moi dit le canard, pas moi dit le chat, pas moi dit le cochon. “Et bien ce sera moi dit la poule” Et c’est ce qu’elle fit.
Et ainsi de suite pour récolter, battre le blé, transformer le blé en farine, cuisiner le pain… Par contre quand il a été question de le manger ce pain…


#23

Il y a bien un lien. Les enfants à haut potentiel intellectuel (ou tout autre appellation) ont une sensibilité exacerbée. Ils ressentent toutes les émotions à 200%. C’est vraiment épuisant pour l’entourage, et pour eux-mêmes aussi j’imagine.

Et ça persiste en grandissant. D’où le soit-disant “décalage de maturité” qu’on leur attribue et qui est tout à fait idiot.


#24

… et pour rebondir, ce sont ceux qui semblent le plus accrochés à leurs doudous j’ai l’impression…:mouse2: mais ça se justifierait du coup, ce pourrait s’expliquer par le fait qu’ils ont besoin d’une béquille pour gérer ce surplus d’émotions…

Merci @zartine pour les précisions quand à la seconde version, ça a l’air moins effrayant… je vais me pencher sur le sujet!


#28

On peut aussi dédramatiser avec des livres parodies comme le génial MADEMOISELLE-SAUVE-QUI-PEUT de Philippe Corentin , où le petit chaperon rouge est une peste qui terrorise le loup , hilarant et ils sont fans …
Je me souviens aussi que mon fils adorait certains livres où des monstres le terrorisaient , j’avais collé des caches sur les images qui lui faisaient trop peur … mais il aimait bien s’attarder un peu à regarder les caches … ( et on s’amusait à se moquer d’eux et à leur donner des noms d’oiseaux , il hurlait de rire , tout fier de pouvoir en rire ).


#29

Bien sûr il faut savoir choisir quelle histoire on raconte à qui, et les histoires effrayantes ne sont clairement pas pour les petits…
J’ai envie de plaider pour que chaque enseignante puisse lire le conte ou l’album qui lui parait adapté à ses enfants sans se référer à une liste obligatoire… Se poser la question “est-ce que ça ne risque pas de faire trop peur ?”, bien sûr, mais aussi : “est-ce que ça n’est pas trop long, est-ce que ça va les intéresser, est-ce que c’est bien dit, bien écrit, les illustrations sont-elles de qualité, est-ce qu’il y a un message et si oui suis-je d’accord avec…” et au final la plus importante "est-ce que j’ai envie de lire ce texte à mes enfants ?"
L’important c’est de donner et de prendre du plaisir dans ces moments là… et savoir que malgré tout le soin qu’on met à choisir un texte, on doit pouvoir se rendre compte s’il ne convient pas à son auditoire ou à une partie de l’auditoire… dans ce cas laisser tomber, et s’en rappeler pour affiner son prochain choix…

Sinon j’ai peut-être un peu surréagi à l’idée de faire vivre nos enfants au pays des Bisounours, qui me parait un peu risquée, comme celle de contrôler toutes les images qui passent devant les yeux de son enfant… Tout contrôler pour son enfant c’est ce qu’on est obligé de faire quand il vient de naître, surtout en tant que maman… et ensuite c’est tout un art de savoir quoi continuer à contrôler sérieusement, jusqu’à quand, et sur quoi et à quel moment il est temps de lâcher du lest… à chaque étape de la croissance d’un enfant il faut changer, adapter ses façons de parler et de faire, faire évoluer les règles, les habitudes : ça peut être angoissant, mais c’est aussi libérateur…


#30

Bonjour à tous,

J’ai assisté à une conférence de Catherine Gueguen pendant laquelle une question bien intéressante a été posée sur le choix des livres pour les enfants de moins 5 ans.

Déjà, il y a quelques années, une amie qui était alors en formation Montessori en Angleterre, m’avait dit que les contes, les histoires qui font peur ( même un peu) étaient bannis de la bibliothèque de la structure où elle était en stage. Exit méchants loups, sorcières et monstres cruels !
A l’époque, j’avais trouvé cela exagéré car les enfants à qui je lisais des histoires réclamaient encore et encore certains livres où il y avait pourtant ces personnages peu sympathiques.
Année après année, j’ai tout de même sélectionné, et force est de constater que depuis quelques temps, je fais particulièrement attention.

Les propos de Catherine Gueguen m’ont confortée dans mon choix.
Elle nous a expliqué que ces histoires ne sont pas adaptées au cerveau d’un enfant de moins de 5 ans environ, parce que son cerveau ne peut pas gérer la peur, qu’il n’a pas de recul…
Non, cela ne l’aide pas à mettre des mots sur ces peurs la plupart du temps, car au contraire cela lui apporte d’autres peurs, qui n’étaient pas les siennes et dont il se serait bien passé !
Elle dit que l’on s’étonne que les enfants n’arrivent pas à s’endormir parce qu’ils ont peur des monstres, du loup etc mais que c’est nous qui avons apporté ces personnages trop tôt !

Elle a évidemment aussi expliqué que certains allaient jusqu’à utiliser ses personnages pour faire obéir les enfants, mais je passe là-dessus, parce que sur ce forum, je pense que tout le monde est convaincue que cette pratique est néfaste !

Quelqu’un est intervenu : " oui, mais pourtant, ce sont eux qui les demandent, et redemandent…"
Et là, sa réponse m’a vraiment interpellée.
Un enfant qui se sent en sécurité, un enfant qui connaît les émotions, avec qui on en parle beaucoup, qui est autorisé à montrer ses émotions, ne choisira pas un livre qui lui fait peur, et il saura dire non, il saura aussi dire qu’il préfère sauter un passage par exemple.
Mais un enfant qui n’a pas cette capacité là, qui est déjà coupé en partie de ses émotions, va simplement être fasciné par un livre qui lui fait peur, et quand on est fasciné, on peut demander à voir encore et encore…cela ne veut pas dire que cela est bénéfique.

J’en suis arrivée à la conclusion que si l’on peut laisser un enfant choisir sans souci ses livres à la maison s’il est accompagné, que ses émotions sont acceptées et reconnues, dans une classe, où il y a des enfants particulièrement fragiles, il faudrait être vraiment prudent…et garder les personnages effrayants pour les années suivantes, où là, ils auront toute leur place.

Voilà, je voulais simplement partager cette réflexion qui, je trouve, ne coule pas de source…
Dans la salle, à l’issue du débat, j’en entendu beaucoup d’adultes se souvenir de tel ou tel livre qui les avait traumatisé, et je me suis dit que ce n’était pas anodin quand même…


#31

Je viens de découvrir vos posts précédents.
Pour ce qui est des contes, c’était évident pour moi qu’il fallait attendre 5/6 ans au moins…euh même plus pour certains !
En revanche, les exemples que j’ai entendu citer, et mes propres souvenirs, concernent des ouvrages plus récents, et qui sont dans beaucoup d’école, voire de crèches…
Par exemple, Chien Bleu de Nadja ou Les Trois Brigands de Tom Ungerer ( qui sont superbes, mais que je ne lirai plus à un enfant d’au moins 5/6 ans)…


#32

Il y a aussi le “Géant de Zéralda” (Tom Ungerer) que j’ai relu à mes enfants il y a peu de temps mais que ma fille avait déjà découvert en maternelle ! :scream:


#33

@papillon Merci pour cette synthèse. C’est super intéressant!


#34

ce que j’ai surtout trouvé intéressant d’ailleurs est de voir à quel point cette question en particulier avait entraîné des remises en question…La salle était pleine de personnes informées, connaissant les travaux de Catherine Gueguen, et c’est la seule chose qui a soulevé quelques " ah bon ???" et qui a entraîné une “sortie de souvenirs”, une parole partagée entre les gens qui se souvenaient des livres (soit en se disant : bah voilà pourquoi j’avais si peur / Oh mince comment j’ai pu lire cela à mes enfants, alors que je voyais bien qu’ils avaient peur !?!).

J’entends souvent “oui mais les choses effrayantes existent, il faut en parler, il faut justement apprendre à mettre des mots sur la peur”. Pourtant, j’ai l’impression que non justement, là, il s’agit de personnages qui n’existent pas, d’un jeu avec la peur qui arrive trop tôt…
Et puis, c’est comme pour les écrans ou la violence : est-ce que sous prétexte que le monde en est rempli, on peut sans souci coller un bébé de 6 mois devant un écran, et être au moins “un peu” violent avec un enfant ? Non… C’est comme la frustration, à cet âge, ils ont leur dose, inutile d’en rajouter ! Bref, je crois que je suis pour la censure dans la petite enfance, et franchement, je suis la première surprise ! ah ah…


#35

Je crois que les contes traditionnels, avec leur côté horrifique et angoissant, ont été écrits pour aider les futurs adultes à comprendre les choses importantes et difficiles à expliquer de la vie, du passage de l’enfance à l’âge adulte… Ils ont un côté initiatique souvent… Et quand Bruno Bettelheim parlait de leur intérêt pour les “plus jeunes”, il devait imaginer des enfants d’au moins 6 ans…
En France avec la scolarisation massive des enfants dès 3 ans, on a sans doute fait l’erreur de vouloir aller trop vite dans certains domaines…
Ceci dit, je pense aussi que des peurs et des sensations angoissantes existent chez le très jeune enfant, et qu’il n’est pas interdit d’en parler, y compris avec des histoires ou des albums… adaptés. La peur du noir, la peur de l’abandon, la peur de la violence, et d’abord de sa propre violence, de ses propres colères, et même la peur de la mort sont des “classiques” dès 3 ans… Les cauchemars et les terreurs nocturnes si fréquents à cet âge en sont une illustration…
Avec les petits de moins de 5 ans je pense qu’on peut aborder ces sujets si on reste sobre, “soft” et rassurant… en n’oubliant pas la tendresse, et/ou avec un peu de fantaisie et d’humour joyeux… pour dédramatiser et mettre des mots sur des inquiétudes, pour humaniser en quelque sorte des sensations universelles, et non pour en rajouter bien sûr… “Petit Ours Brun a peur du noir”, “Va t’en Grand Monstre Vert !”, “Max et les Maximonstres”…
Mais je crois que je vais faire encore plus attention quand même, maintenant que j’ai lu tous ces messages intéressants… et cette année, je ne vais peut-être pas leur lire “le loup et les 7 chevreaux” ni “le Petit Chaperon Rouge”, même en fin d’année… J’ai justement des PS fragiles cette année…


#36

Max et les maximonstres !!! Je l’ai découvert trop tôt celui là aussi…
Je l’ai toujours, et rien que voir la couverture me donne quelques frissons ! ( et même si l’on part du principe que j’étais particulièrement sensible, il y aura toujours, dans une classe, des enfants particulièrement sensibles !)
Et pourtant, il est chouette ce livre, ce n’est pas là le souci.

Le petit chaperon rouge, trop tôt aussi pour moi ( pourtant, je pense que j’avais un peu plus de 6 ans) : je vivais juste à côté d’une forêt, la conséquence a été claire : alors qu’avant j’allais y jouer avec joie avec mes amis, j’ai commencé à associer “forêt = danger”. En revanche, j’ai travaillé sur ce conte, et des réécritures avec des ados de 12 ans, et là ils ont adoré, on a pu parler des peurs, des significations du conte…
Catherine Gueguen a rappelé que ces contes avaient été initialement écrits pour des adultes ! Il me semble que c’est plus compliqué que cela, mais tous les cas, ils n’ont pas été écrits pour être lus à de enfants de moins 6 ans, c’est évident. La violence des contes de Grimm (avant d’être un peu adaptés, édulcorés) est incroyable…

Ces peurs du noir, des monstres, seraient-elles aussi présentes sans les histoires ? J’en doute de plus en plus…On ne connaît pas la nature des cauchemars des enfants avant qu’ils découvrent ces monstres, sorcières pas sympa, images sombres, tours de magie douteux and co.

Je réalise à quel point cette question est difficile. La littérature jeunesse regorge de livres qui font peur, mais aussi de livres bourrés de violence éducative, donc le choix se restreint assez vite, et quand on a des enfants en grande demande de livres…il devient de plus en plus difficile de trouver des livres adaptés !

J’ai du mal avec l’association de la colère avec des monstres. C’est quelque chose que j’entends de plus en plus. Dans les livres, ou dans des paroles " allez, viens, on va faire sortir le dragon qui est à l’intérieur de toi"…Je suis consciente, qu’avec beaucoup d’humour, cela peut passer, mais je suis bien embêtée quand même. Parler de la colère que ressente les enfants en associant des images négatives ( il y a un monstre à l’intérieur de toi !), cela me gène vraiment, sans pouvoir formuler cela parfaitement…Outre la peur de l’enfant qui va réellement croire qu’il y a “quelque chose” à l’intérieur de lui, il y a cette association colère = émotion négative.

Isa1, tout à fait d’accord, la scolarisation à 3 ans a changé la donne…On les pousse à grandir trop vite !

Et d’ailleurs, la collectivité à 3/4 ans ( ou même en crèche) change la donne aussi : un enfant qui n’a jamais eu peur du noir, un parent n’aura pas l’idée de lui lire un livre qui parle de la peur du noir ! En revanche, en classe, ce livre va peut-être être lu à tous les enfants et ceux qui n’avaient pas peur du noir vont se mettre à en avoir peur…
Et puis certes, bien accompagné, tout cela ne produit pas des catastrophes, mais malheureusement, des enfants vont trouver un accompagnement chez eux, mais pas en classe, et d’autres, en classe, mais pas chez eux…

Je vais être plus prudente moi aussi…


#37

Il y a aussi les enfants qui ont peur du Père Noël, de l’orage, du vent, des bruits violents comme les pétards ou les passages des avions de chasse… les enfants ont souvent peur des inconnus, aussi, et j’ai même eu une élève qui avait peur des… hommes… seul son père pouvait lui parler et l’approcher… Et maintenant il faut gérer aussi les angoisses des minutes de silence en mémoire des attentats et des alertes anti-intrusion qu’on est obligé de faire aussi en maternelle…
La peur fait partie de la vie, c’est normal d’avoir peur de ce qui est dangereux, et il faut bien apprendre à vivre avec… on peut avoir à coeur de ne pas en rajouter pour nos chers petits à ce que la vie impose de toutes façons, mais il faut quand même savoir qu’on ne pourra jamais protéger nos enfants de toute peur et de toute angoisse…
Alors, à nous d’être vigilantes, mais à nous aussi d’être un peu à l’aise avec les peurs enfantines : on ne peut rassurer les enfants qui ont peur que si on le sait, si on veut bien le voir, déjà, et ensuite si on se donne la peine de prendre en compte ces émotions particulières, d’en parler, et si possible aussi, d’en rire pourquoi pas… et je continue de penser que les histoires, les albums pour enfants, et certains contes, offrent un moyen distancié et intéressant d’aborder des sujets à la fois universels et difficiles…
Sinon je suis d’accord avec toi papillon quand tu es gênée d’entendre “on va faire sortir le monstre qui est en toi !” Certains albums abordent le sujet des colères enfantines en partant du ressenti des enfants qui peuvent avoir l’impression qu’ils sont sur le point de se transformer monstrueusement sous l’effet de cette émotion : mais ces histoires ne peuvent être bénéfiques que si elles restent des histoires… d’ailleurs au fil de l’histoire si elle est bien faite l’enfant ou le petit animal qui se sentait submergé de colère au point de se sentir monstrueux, comprend que ce “monstre” premièrement n’est pas si terrible, qu’il ne demande qu’à se radoucir, deuxièmement qu’il est imaginaire, et troisièmement que ça n’empêche pas ses parents et ses amis de continuer de l’aimer… on les lit, on parle de ce qui vient, et puis c’est tout… essayer d’en faire des outils thérapeutiques comme ça, c’est contre-productif…


#38

Oui, je suis tout à fait d’accord, les enfants ont beaucoup de peurs ( un bruit, le vent, un orage, ou des choses plus surprenantes peuvent lui faire ressentir la peur), mais c’est justement pour cela que je suis en train de prendre conscience qu’il ne faut pas en rajouter avec des monstres, qui, au lieu d’apaiser les peurs qu’ils connaissent déjà, vont en créer de nouvelles.
Apprivoiser le bruit du vent, apprivoiser la peur de l’eau, apprivoiser la peur des camions me semble bien plus cohérent qu’apprendre à apprivoiser la peur de personnages imaginaires ( pour commencer !). La peur fait partie de la vie, donc cherchons dans la vie, avant de chercher dans l’imaginaire…c’est ma conclusion, là, maintenant…suite à cette conférence, à ce que je lis depuis, à une plongée dans mes propres souvenirs…

Lorsque j’ai découvert les livres de Komako Sakai, je me suis sentie apaisée, ces histoires sont apaisantes, et pourtant elles parlent aussi de la peur…mais à partir d’expériences quotidiennes, vécues réellement par les enfants.

Partir de cette question m’emmène loin peut-être mais cela évoque pour moi un des gros problème des programmes, de la scolarité qui est la même pour tous. Comme on répond aux enfants avant qu’ils aient eu le temps de se poser la question, on anticipe leurs possibles peurs futures…
Alors que si on suivait réellement le développement de l’enfant, on attendrait qu’il s’interroge sur les dinosaures pour lui en parler, on ne le ferait pas " parce que c’est au programme de l’année". Et de la même façon, un livre sur les monstres viendrait au moment où l’enfant en parle et le demande, un livre qui évoque la peur de l’eau viendrait au moment où les parents découvrent cette peur chez l’enfant…s’ils éprouvent le besoin d’avoir un support pour en parler !

Ceci dit, si j’aime bien, lorsque je remets en question quelque chose, aller jusqu’au bout, c’est simplement pour avoir ensuite une direction, une forme d’idéal qui donne des repères, mais il n’est pas non plus question de faire de tout cela un dogme, et de ne plus rien oser lire aux enfants, ou de se mettre à culpabiliser trop fort parce que j’aurais lu ceci ou cela…Les exceptions, les erreurs seront toujours sur le chemin, et les enfants ont des rythmes différents, des environnements différents, des histoires différentes…


#39

Je ne connais pas Komako Sakai, je vais chercher, quelque-chose me dit que ses livres vont me plaire…
J’adore discuter avec toi Papillon, et je ne voudrais pas non plus qu’à me lire, on puisse se dire qu’il faut lire des histoires aux enfants pour les aider à apprivoiser leurs éventuelles peurs… Jamais je n’ai choisi un livre pour mon fils ou pour mes élèves dans ce but… Lire ou raconter une histoire à des enfants, c’est d’abord et avant tout partager un plaisir, une envie, de la joie, c’est leur offrir un moment de partage et de culture… C’est pourquoi je n’aime pas trop, généralement, les ouvrages qui font explicitement référence à un objectif “psychologique”… ou alors il y faut un peu de talent quand même, de la tendresse, de l’humour et de la fantaisie, ou de la poésie… si c’est juste pour faire la morale aux enfants, si le message est tellement clair qu’il en devient con, je ne vois pas l’intérêt…
Les contes traditionnels, et certains albums, sont à la fois du plaisir, de la poésie, de la culture et, en plus, ils abordent, mais sans en avoir l’air, des thématiques complexes… Mais si ils font peur aux petits, ils ne leur feront aucun bien non plus…
Pour le choix des textes, il ne nous reste qu’à écouter notre propre sensibilité, en se posant les bonnes questions…


#40

Je pense que tu vas aimer aussi Komako Sakai…:wink:
Certains sont vraiment pour des enfants très jeunes, d’autres un peu moins, mais dans tous les cas, j’ai toujours eu des “encore !” même avec des enfants plus grands. J’aimerais trouver beaucoup plus de livres comme ceux-là…Quand j’étais petite, j’étais déjà bien branchée auteurs japonais d’ailleurs ( Satomi Ichikawa, et aussi la collection des souris d’ Haruo Yamashita et Kazuo Iwamura).

Parce que je n’aime pas non plus les livres à prétexte psychologique (c’est comme les jeux “à but éducatif” , les enfants voient bien qu’il y a des attentes derrière ! ), que je n’ai moi non plus jamais voulu faire peur et donc évité les livres trop sombres ( en général, facile, ils me font peur à moi aussi même encore aujourd’hui !), il y a finalement beaucoup de livre que j’évite, et je sens qu’il y en aura encore plus maintenant !
Ceci dit, je découvre aussi plein de nouveaux auteurs et univers doux, poétique, quotidien à chaque fois que je passe à la librairie…la révolution de la bibliothèque est peut-être nécessaire aussi !

Je te rassure, je ne me suis pas dit en te lisant que tu voulais lire des histoires dans le but d’apprivoiser leurs peurs ! :slight_smile:
Je voulais juste pousser la réflexion par rapport à ce que tu disais sur le fait qu’on ne pouvait pas “protéger les enfants de toute peur et de toute angoisse”, en me disant qu’on pouvait au moins ne pas leur en ajouter en piochant dans l’imaginaire alors qu’ils sont déjà remplis de peur et d’angoisse par des choses réelles, et aussi les épargner autant que possible pendant leurs premières années.

Une histoire reste une histoire, et pourtant, l’imaginaire peut emmener loin, si loin…
Je me suis posée beaucoup de questions ( euh je m’en pose encore autant) lorsque j’ai commencé à faire des ateliers théâtre avec des touts petits…La frontière entre le réel et l’imaginaire n’est pas toujours évidente, pas du tout même. Une histoire peut vraiment toucher, bousculer, inquiéter, et c’est évidemment aussi cela qui est merveilleux, parce que justement c’est l’occasion d’expérimenter l’empathie par exemple, et de se laisser traverser par des émotions. Mais c’est vrai qu’à l’âge des tempêtes émotionnelles, je me dis que l’on a vraiment intérêt à réfléchir à ce que l’on propose…

Moi aussi j’aime beaucoup discuter avec toi !:slight_smile: :slight_smile:

Bonnes lectures !


#42

Il existe de merveilleux livres sans réelles péripéties !
Mais là n’est pas vraiment la question, il n’a jamais été dit dans ce post qu’il fallait éviter les peurs, ou de choisir des livres dans lesquels il n’y aurait aucun risque que l’enfant ressente de la peur, simplement de veiller à ne pas ajouter des peurs à coups de monstres, sorcières, magie etc avant un certain âge ( 5-6 ans). Tout simplement pour éviter trop de peur, trop de stress, trop de cortisol puisque l’on connaît maintenant les effets sur le développement du cerveau si fragile à cet âge…
On peut parler de la mort et de l’inconnu, sans passer par des contes ou des histoires sordides destinées en fait aux adultes, ou au moins aux enfants plus âgés. La mort et l’inconnu existent, font partie de la vie de l’enfant, le grand méchant loup n’existe pas…
Il n’est pas question de remettre en question tout ce peuvent apporter certaines de ces histoires, et contes, simplement de veiller à ne pas les introduire trop tôt…


#44

Bonjour @bataille, mon fils n’est pas craintif, car “surprotégé”, il a peur de créations effrayantes et imaginaires véhiculées par certains albums. En revanche, je pense comme @papillon : les choses qui peuvent nous faire peur dans la vie réelle sont à apprivoiser, car elles font partie de la vie, inutile d’en rajouter d’autres. [quote=“bataille, post:41, topic:1670”]
le tabou, dont on entoure maints sujets secrets des enfants, crée une aura d’inquiétude qui ne se lève qu’avec l’effroi de la découverte du fait réel : on craint que les petits puissent avoir peur de telle chose, alors on ne leur en parle pas, et la méconnaissance où ils sont demeurés si longtemps les effraie fort quand ils sont enfin témoins de la chose
[/quote]

En fait, je crois que tu mélanges plusieurs choses. Rendre tabous certains sujets en ne les évoquant pas est justifié, à partir du moment où on en parle au moment adéquat : quel intérêt d’amener un enfant voir sa mamie sur son lit de mort ou lui parler des attentats ? Ne vaut-il pas mieux attendre qu’il ait la capacité de comprendre et de pouvoir surmonter ces choses-là ?

Si un enfant ne serait pas étonné outre mesure de voir disparaître sa maison, c’est grâce à la pensée magique. D’ailleurs, en quoi serait-ce effrayant de voir disparaître sa maison, puisqu’elle peut réapparaître aussitôt… grâce à la pensée magique. En revanche, le pendant négatif de la pensée magique, c’est que pour l’enfant, des choses imaginaires très effrayantes peuvent devenir réelles.

Il me semble que l’on peut parler de certains sujets comme la mort sans les imager. Tout comme l’on peut répondre à leurs inquiétudes sur différents sujets en répondant simplement à leurs questions. Les enfants attendent souvent une réponse, même courte: elle constitue pour eux une explication, on a répondu à leur question, ils peuvent maintenant passer à autre chose.

Pour avoir éprouvé tout ceci avec mon fils comme avec mes élèves, je persiste à penser comme C. Gueguen et @papillon. Et j’avoue que les analyse psychologiques telles que :“il projette ses peurs sur la sorcière ou les monstres” m’horripilent. Lorsqu’un enfant voit une image effrayante, elle s’imprime sur sa rétine et ressurgit de manière encore plus terrorisante la nuit, notamment.


#45

@Bataille, nous parlons d’enfants jeunes dont le cerveau n’est pas en capacité de gérer des émotions fortes (cf les connaissances actuelles en neurosciences). C’est ce point qui nous fait éviter les histoires qui font peur, tout simplement.