Bonjour @DanieleDumont,
Il est important de rappeler que les sciences cognitives, nous invitent, pour permettre à l’enfant de bien entrer dans le code de la lecture, à bien séparer le nom et le son pour ne pas créer de confusion. Donner le son en premier lieu évite les confusions chez l’enfant lorsqu’il entre dans le code. Voici un passage du livre de Céline Alvarez qui explique bien ce point :
"Les lettres de l’alphabet écrites en typographie cursive (en attaché) étaient découpées dans du papier émeri et collées sur des planchettes de bois. Je disais alors à l’enfant : “Tu te souviens que dans mmmmmmoto, on entend [m] ? Eh bien regarde, je vais te montrer comment on écrit “mmm.” Je plaçai alors la lettre “m” devant l’enfant, la traçais en prononçant le son, et invitais l’enfant à faire de même. Nous savons aujourd’hui, grâce à des études - et par la pratique - que tracer la lettre en la prononçant renforce de manière très nette la mémorisation à la fois du tracé et du son. “Combiner la prononciation et le tracé s’avère une excellente méthode” est-il affirmé dans l’excellent ouvrage Apprendre à lire, dirigé par Stanislas Dehaene. C’est également ce qu’affirment les experts des troubles spécifiques des apprentissages : plus l’apprentissage est multisensoriel, plus il est efficace. La plupart du temps, trois lettres étaient présentées en même temps à l’enfant par une leçon en trois temps. (…) Vous noterez, qu’à ce stade, le nom de la lettre n’est pas donné aux enfants. Il est en effet vivement recommandé par la recherche de bien séparer le nom de la lettre et le son qu’elle produit, au risque d’induire des erreurs de lecture chez l’enfant : en effet, si l’enfant pense que la lettre “p” code le son “pé”, que la lettre “c” code le son “cé”, ou que la lettre s code le son “ès”, il lira le mot pic “péicé”, le mot sac “èsacé” ou encore le mot fil “éfil”. Pour éviter toute confusion, nous ne donnions à l’enfant que le son des lettres. Nous avons rigoureusement respecté ce principe, car, nous avons pu faire l’expérience des difficultés que l’enseignement du nom (avant celui du son) pouvaient engendrer chez les enfants : la première année à Gennevilliers, nous avons accueilli des enfants de moyenne section qui avaient effectué un an de maternelle traditionnelle en petite section, et ils avaient, comme cela se fait traditionnellement, appris le nom de quelques lettres, plutôt que leur son. Lorsqu’ils s’élançaient pour lire, leur élan se trouvait entravé par leur premier apprentissage : pour lire “mur”, ils lisaient “èmuèr”, et bien évidemment, ils n’accédaient pas au sens du mot et ne voyaient pas l’intérêt de lire. Il fallut un certain temps pour leur faire comprendre que la lettre “m” fait [mmmmmm] et non (èm). Pour ces enfants, le démarrage de la lecture était clairement parasité par cet apprentissage, qui, pour certains était déjà solidement ancré. Lorsqu’il savaient lire les enfants apprenaient ensuite naturellement le nom des lettres, grâce à des comptines notamment ; mais uniquement lorsque la lecture était automatisée et qu’il n’y avait plus aucun risque de confusion.
Tant que l’enfant ne lisait pas avec fluidité, nous n’évoquions jamais avec lui le nom des lettres. Ainsi, nous ne disions pas au jeune enfant “Voici la lettre “éf” qui fait fffff”, nous disions “Voici “ffff”.” (…) Il est par ailleurs très important de veiller à présenter ces sons aux enfants sans “e” final : “mmm”, “chhh”, ssss” plutôt que “mmmme”, “che”, “sssse”… Sinon, lorsque l’enfant tentera de lire le mot mur par exemple, l’enfant décodera : “mmmmmeuuur” au lieu de “mmmmur”. Ce qui entrave considérablement l’accès au sens et freine l’enfant dans sa conquête. Prononcer les consonnes sans ajouter de “e” final peut demander un peu d’entraînement, mais il est essentiel de faire cet effort. Notre imprécision peut devenir une entrave à son entrée dans la lecture.
Pour ceux qui souhaitent en savoir plus vous pouvez lire la partie 2 du livre ou visionner les vidéos de l’accompagnement didactique, celles ci notamment :