Permaculture scolaire


#41

Les motifs, ce sont les lignes directrices qui organisent notre travail. La nature avance rarement en ligne droite. On y observe des arborescences, des spirales, des courbes diverses qui font la richesse du monde qui nous entoure. En classe, procédons de même, par petites touches.

L’enseignement spiralaire invite à revenir régulièrement sur un même notion en élargissant progressivement la difficulté. Pourquoi priverait-on les jeunes enfants de découvrir des domaines sous prétexte que c’est réservé au programme des classes supérieures.

En numération par exemple, les collègues des grands nous regardent généralement de travers quand nous sortons le matériel des perles avec les maternelles. D’autant plus quand nous introduisons le vocabulaire des unités, dizaines, centaines, milliers. Perles unités dizaines centaines milliers.pdf Ce n’est pas au programme m’a-t-on reproché, les grands nombres ne seront vus qu’en cycle 3. L’apprentissage théorique, oui, mais l’aborder avec les petits par la manipulation est tellement naturel et motivant. Pourquoi s’en priver ? Les enfants adorent compter les petites perles une par une, mais ils comptent tout aussi bien les barrettes dix par dix ou les plaques cent par cent. Et comme l’objectif est de mettre en relation une quantité et une écriture chiffrée, en particulier l’itération pour passer d’un nombre au nombre suivant, autant le travailler en variant les approches. Tout en affinant leur motricité fine et leur concentration.

De même quand les collègues de CP nous voient travailler le codage des sons avec des élèves de moyenne section, certains font des bonds ! L’apprentissage de la lecture est l’apanage du cycle 2, c’est sacré. Certes, mais si un enfant de 4 ans plein de curiosité est assez motivé pour chercher à comprendre l’intérêt de l’écrit au point de vouloir découvrir la relation entre les sons et les groupes de lettres, pourquoi le lui refuser ? Ecrire avec les lettres découpées en bois.pdf Il ne s’agit que d’une première découverte qui ne fera qu’entretenir sa motivation et le poussera à entrer dans le monde des livres. On travaillera à cette occasion la phonologie et le langage dans toutes ses dimensions, ce qui est bien au programme de maternelle.

Osons ainsi élargir l’horizon des élèves de maternelle dans de nombreux domaines, quand bien même la maîtrise théorique leur sembleraient interdite. Les enfants sont friands de découvertes véritables. Par la manipulation, le jeu, les rencontres de professionnels, on peut tout à fait avec eux aborder des sujets complexes. N’ayons pas peur de nommer les choses avec des mots compliqués, les élèves en raffolent. Quitte à ce que ces même notions soient revues plus tard de façon plus approfondie, c’est le principe de la spirale.

Voici un autre exemple qui illustre bien l’apprentissage spiralaire. Les nombres premiers, une notion en numération qui sera vue et revue à tout age. Avec les petits, il s’agit juste d’essayer de placer un certain nombre de jetons de façon à former un tapis, en lignes et en colonnes. Parfois c’est possible, comme avec 10, on fait deux lignes de 5 (ou 5 lignes de 2). Il y a même des fois plusieurs possibilités, comme avec 12. Avec d’autres nombres, 3, 7, 11… , que l’on appelle les nombres premiers, ce n’est pas possible. On aborde cette notion avec le matériel montessori des 55 jetons rouges quand on range les jetons par deux de 1 à 10, certains nombres sont paires, d’autres non. Cette même notion sera revue quand les élèves travailleront les tables de multiplication en CE1-CE2, puis les divisions posées en CM. Enfin, le travail sur les nombres premiers fait encore l’objet de recherches universitaires en mathématiques.

Enfin, cette vision spiralaire s’applique pour la mémorisation. Il est recommandé pour que les élèves se souviennent d’un mot nouveau par exemple, de le rappeler plusieurs fois en situation. On le fait répéter aux enfants une première fois juste après le leur avoir appris. Puis on reprend ce terme nouveau en bilan en fin de séance, afin bien ancrer les apprentissages. Il faudra ensuite le réactiver plusieurs fois pour une bonne mémorisation, en fin de journée, dans la semaine, puis dans l’année. Ces rappels devraient dans l’idéal être notés et programmés par l’enseignant. De façon plus souple, j’ai pris l’habitude de faire un petit bilan systématique en fin de séance, puis verbaliser en fin de journée aux élèves ce qu’ils avaient aimé. Avant, je demandais ce qu’ils avaient appris, mais ce qu’ils ont aimé leur parle plus en maternelle. J’en profite alors pour faire raconter en utilisant les mots nouveaux appris. Une liste affichée en classe peut aider à en garder une trace écrite. Plus tard dans l’année, on reviendra dessus en feuilletant le cahier de vie. Il faut donc que ce mot soit dans les consignes et légendes des photos collées. On nous demande à l’école d’enrichir le vocabulaire des enfants de plusieurs mots nouveaux par jour. A nous de trouver un fonctionnement qui nous permette de nous y tenir quotidiennement.

J’ai travaillé cette année avec une intervenante nature sur le thème des insectes pollinisateurs, les abeilles. Avec les petits elle a une super approche active qui les implique. On a observé, touché, goûté, manipulé ; et on est beaucoup sorti. Elle n’a pas hésité à utiliser pour l’occasion des mots précis. Les enfants ont appris et adoré réutiliser des termes comme mandibules, pollen, alvéole … Et avec le support d’un album nous avons aussi abordé des notions plus complexes comme la pollution chimique (le superplantox dans l’histoire) qui décime la population des insectes (dans l’album, les abeilles deviennent zinzins). Ce sont des thèmes d’actualité, les néocortinoïdes autorisés sous la pression des lobbys agro-industriels pour traiter les betteraves à sucre sont une calamité, 80% des insectes ont d’or et déjà disparus, les sols deviennent stériles. Les enfants que nous avons en charge sont concernés, et le seront d’autant plus quand ils auront à faire face aux dégâts que nos générations avons provoqué. C’est de l’éducation citoyenne, sont-ils trop jeunes pour y réfléchir et avoir leur avis ? Je ne le pense pas. A nous enseignants de trouver comment aborder de telles notions sans parti pris et à leur niveau. En manipulant, en abordant par tous les sens, en vivant des expériences, des rencontres.


#42

Le motif de la spirale illustre bien le fait de revenir régulièrement sur une même activité, à des niveaux de difficulté croissants. Un élève qui se désintéresse d’un matériel à un moment donné pourra y revenir par la suite, mais il faudrait alors lui donner un défi supplémentaire pour le motiver à ne pas simplement refaire ce qu’il maîtrise parfaitement. Les enfants aiment refaire plusieurs fois des activités faciles qu’ils savent bien faire, cela les rassure. Mais un rôle de l’enseignant est de les pousser un peu plus loin, dans ce que l’on appelle leur zone proximale de développement.

C’est ce pourquoi j’ai mis en place mes fiches de suivi avec les étoiles et cinq marches de consignes pour chaque matériel. Un élève en réussite dans une consigne donnée pourra déjà la présenter à d’autres élèves, et si j’assiste à la présentation, je le valide en notant une cinquième étoile sur sa fiche de réussite (quand je prends le temps d’en compléter une). Je peux lui proposer ensuite, après l’avoir félicité, de lui présenter la consigne suivante, celle qui est écrite sur la marche du dessus. Puis de passer à un autre matériel qui va un peu plus loin dans les apprentissages dans la même compétence.

J’ai défini ainsi des progressions linéaires dans certaines compétence donnée. J’avais intitulé pompeusement cela des projets d’apprentissage. Mais je me suis vite rendu compte que les élèves apprennent rarement de façon linéaire, et préfèrent souvent changer complètement d’activité avant de revenir travailler plus tard sur le même matériel. Comme dans la nature, les élèves n’aiment pas les lignes droites. Ils vont rarement suivre une progression directe telle que l’enseignant pourrait l’avoir prévu. Ou telle que programmée dans les manuels scolaires.

C’est tout l’intérêt du fonctionnement de la classe en activités libres autonomes. Les élèves suivent leurs envies, ils sont les meilleurs juges de leur travail. Avec la motivation en plus.


#43

Un autre motif qui peut nous inspirer dans la conception de nos classe est l’arborescence. C’est une structure fractale qui fait que la même organisation se retrouve à différentes échelles. Le tronc d’un arbre se divise en branches principales, qui se divisent elles même en branches secondaires, puis en petites branches, en rameaux, en brindilles. Ainsi environ à six niveaux différents pour un arbre, ce qui permet à son feuillage d’occuper un espace optimal.

Ce cheminement peut être suivi quand en langage on précise un terme générique avec les élèves. On peut découvrir avec eux qu’un mot vague comme le mot animal se décline en plusieurs branches lexicales, selon qu’il s’agit d’un insecte, d’un oiseau, d’un poisson. Ces familles elles même se divisent en catégories plus précises. On n’ira sans doute pas avec eux en taxinomie jusqu’à la dénomination précise de l’espèce en latin. Je l’ai eu fait ponctuellement pour mon projet sur les abeilles, invertébré insecte hyménoptère Apis mellifera. C’est en observant et en précisant les choses que l’on entre dans la richesse du langage avec eux. Divers jeux, comme les devinettes, permettent de le travailler. Le guide pédagogique intitulé Catégo (Eds Hatier) propose des exercices en ce sens.


#44

Intégrer au lieu de ségréguer

On nous demande maintenant dans les classes d’intégrer les enfants en situation de handicap. Le cas ne s’est jamais encore présenté pour moi, mais d’après des collègues qui l’ont vécu, la bonne intégration de l’enfant dépend vraiment de la situation, du handicap, de l’accompagnement des familles, et de la personne de l’AVS qui peut nous seconder dans la classe. Quoi qu’il en soit, c’est toujours l’occasion de réfléchir à ses pratiques pour les adapter à la situation.

Et c’est le cas chaque année quand on accueille les petits nouveaux, tous divers, certains en grande difficulté de comportement, de langage. Comment intégrer ces élèves, quand parfois plus de la moitié de la classe est renouvelée. Quand on a la chance de pouvoir garder des élèves d’une année sur l’autre avec une classe multi-niveaux. Comment gérer le début d’année quand certains ont déjà toutes les habitudes de travail autonome, et d’autres ont tout à découvrir ? J’accueille la majorité des tout petits au compte-gouttes au fur et à mesure de l’année, ils s’adaptent donc très bien à la classe en suivant le mouvement. Je n’accueille donc qu’une minorité de nouveaux à la rentrée, ce qui n’empêche pas de devoir remettre en place les règles de la classe.

J’aurais besoin de vos témoignages pour ces deux points.


#45

Peux tu préciser de quels points tu parles exactement ?


#46

Si l’un des points est le renouvellement partiel ou complet de la classe, c’est la situation que je m’apprête à vivre à la rentrée. Nouvelle école, donc aucun de mes 30 futurs élèves ne me connait et la moitié d’entre eux (les moyens) ont eu une première année tout à fait classique.
J’ai eu la chance d’assister à un webinaire sur le sujet. J’y ai trouvé d’excellentes pistes de réflexion, voici celles que j’ai retenues (je vais revoir le webinaire plusieurs fois et prendre des notes): j’avais bien en tête les activités sans présentation. La formatrice nous incitait a ajouter à cela des activités passives: avoir un aquarium dans la classe, par exemple, qui pourra attirer les plus jeunes et permettre peut-être une séparation moins douloureuse, differnets coins lecture (et pas un coin bibliothèque, pour éviter qu’il y ait trop d’enfants au même endroit). Avoir un des adultes (atsem ou enseignant) qui s’installe à un endroit pour lire des histoires, pendant que l’autre accueille les enfants et répond aux questions des parents. Une fois les parents partis, faire en petit groupe une visite de la classe, pour répondre aux besoin des enfants: ici les toilettes, ici un point d’eau pour boire, ici des activités que les enfants peuvent prendre sans présentation. Regroupement, pour quelques exercices choisis de grâce et de courtoisie (ex: poser la main sur l’épaule de l’adulte s’il est occupé), quelques chanson ou histoires. Avoir une chanson qui serve de rituel pour que les enfants puissent prendre des repères (j’ai prévu une chanson en LSF pour se dire bon appétit avant le déjeuner).
Voilà ce dont je me souviens.


#47

Merci pour ta réponse. Ça donne des pistes pour envisager sereinement le début d’année avec une classe en partie ou complètement renouvelée. Bonne idée de multiplier les coins en autonomie, coins lecture, et l’accueil avec des histoires. Et les chansons rituelles pour installer les bonnes habitudes. Quelle est ta chanson en LSF pour se souhaiter bon appétit ?

L’autre point de discussion est l’accueil d’enfants handicapés. Je sollicitais vos témoignages aussi sur ce point, n’ayant jamais encore rencontré cette situation.

Je me suis donné comme objectif il y a presque un an de rédiger quelques réflexions sur chacun des principes fondateurs en permaculture, appliqués à la classe, lieu d’émancipation, d’échanges et de savoir. En relisant ce que j’ai déjà écrit, je me rends compte que l’exercice a été riche sur des sujets variés. Mais cela reste souvent assez théorique. N’hésitez pas à rebondir pour témoigner d’expériences plus pratiques vécues dans vos classe. Merci. Il reste encore quatre intitulés de principes. Si vous vous sentez inspirés par l’un d’eux, n’hésitez pas à vous prêter vous aussi au jeu. :grinning:
- Utiliser des solutions lentes à petite échelle
- Se servir de la diversité et la valoriser
- Utiliser les bordures et valoriser la marge
- Face aux changements, être inventif


#48

Utiliser des solutions lentes à petite échelle

Les enseignants apprennent à être modestes et patients, car rien n’est jamais gagné avec les enfants. Les apprentissages se font en dents de scie.

D’où la difficulté à évaluer des progrès, qui ne sont pas définitifs mais bien plus souvent une photo des réussites des élèves à un instant T. Il faut d’ailleurs relativiser les évaluations normatives institutionnelles instaurées en CP. Elles ne valent guère que pour remplir des statistiques nationales, mais ne sont guère utiles en classe. D’autant plus que les enseignants de CP sont désormais démis de leur rôle d’évaluateur. On leur demande juste de taper les résultats brut. On n’a même plus accès aux algorithmes qui définissent les critères de réussites. Les évaluations formatives que l’on peut faire tout au long du travail en classe sont à ce propos beaucoup plus pertinentes. La démarche des livrets de réussites demandées en maternelle va en ce sens et me paraît plus adaptée à un véritable accompagnement des élèves.

On aurait facilement tendance à vouloir gagner du temps en faisant à la place des enfants. Erreur. Sur le long terme, le temps passé à apprendre à un enfant à être autonome n’est jamais perdu. C’est au contraire un investissement pour qu’à l’avenir s’enclenche un cycle vertueux vers des apprentissages durables. Petit à petit, on construit avec les petits les conditions favorables à ce qu’ils rentrent dans des apprentissages plus complexes. Mais il faut pour cela ne pas lâcher sur l’essentiel, ce dès le début, et prendre le temps, patiemment, de leur montrer, de les mettre en réussite, et de les féliciter.

Je commence en ce sens dès le début d’année avec le rangement. Chaise, coussin, livre, matériel, tout doit être remis consciencieusement, délicatement et sans bruit à sa place. Les fournitures sont limitées et précieusement manipulées et comptées. Les enfants complètent leur pot de crayon avec douze couleurs différentes, Je leur montre de suite comment manipuler, où accrocher les le capuchon, comment tenir le feutre entre trois doigts, comment s’asseoir. Lentement, sur des petites choses pour commencer, et dès leur entrée en petite section, on exige d’eux une attention particulière à l’école. Car ce sera le cas tout au long de leur scolarité à venir.


#49

https://m.youtube.com/watch?v=LNB27Jjj_b0


#50

Le sujet m’intéresse, en effet. En tant que passionnée par les plantes, le jardin, nourricier du ventre et des yeux ! Les 12 principes me font tout de suite penser aux principes de la coopération à l’école, en lien direct avec les futurs citoyens que nos élèves sont tous. Dans mon école, pour le moment, j’ai installé deux petits carrés potagers … sur notre cour en goudron :face_with_raised_eyebrow: … j’ai l’espoir d’obtenir un petit lopin de terre suffisamment sécurisé et proche de l’école pour en profiter avec les enfants !
Est-ce que tu t’es déjà lancé avec ta classe ? Qu’est-ce que ça donne pédagogiquement et pratiquement ?


#51

J’ai moi aussi à la rentrée une cour toute neuve … en goudron :tired_face: Je me suis pourtant battu pour que lui sol soit laissé en terre … battue ! Mais ça ne faisait pas assez propre !!! Je vais du coup avoir moi aussi deux grands bacs dans la cour. J’aurai également accès à un terrain vague … avec de la terre vaguement arable pleine de cailloux. Ce qui constituera un défi permacole pour restituer un sol vivant. Ce sera une première pour moi en maternelle. Jusqu’à maintenant je cultivais en jardinière avec les petits.

Le jardinage est un grand défi avec les élèves. Il n’y a pas toujours tant à faire dans la partie cultivée, et il faut pouvoir assurer dans la durée. Et prévoir les périodes de vacances. C’est bien d’avoir aussi une partie du jardin plus terrassement, tamiser de la terre douce, préparer du compost et observer les petites bêtes, ramasser les cailloux, tresser des herbes, faire des buttes … Les petits fruits (fraises, groseilles) pérennes sont appréciés.


#52

Bonjour @Florian,
Je suis avec grand intérêt tes écrits mais je n’ai pas encore trouvé le temps de tout reprendre depuis le début, j’espère le faire avant la fin de l’été.
Je ne pense pas pouvoir t’apporter beaucoup de mon côté, je n’ai pas repris le travail depuis le confinement ayant enchaîné avec un congé maternité puis parental. Je reprendrai seulement à mi-temps à la rentrée et sur un niveau simple après avoir vécu quatre belles années en classe multi-âge…
Lorsque l’on a travaillé de cette manière plusieurs années et que tout paraît évident, on finit par ne plus trouver les mots pour expliciter sa démarche, ce n’est plus ressenti comme un besoin. Il n’y a plus les doutes des débuts, on ne cherche plus à convaincre, on finirait même par se remettre des oeillères… Tes réflexions ont le mérite, je trouve, de tout remettre en perspective, c’est très intéressant et un beau projet !

J’essaierai avant la fin de l’été de rebondir sur certains points… :wink:


#53

Effectivement, pour avoir mis en place un jardin pédagogique cette année avec ma classe, le plus dur est de le faire vivre au quotidien. Après l’excitation de la préparation de la terre, des semis, plantations, difficile de se tenir à un rituel: désherbage, arrosage c’est chouette mais avec les vacances ça devient compliqué, je n’habite pas dans la même ville que mon école ! Nous avons cependant beaucoup de chance d’avoir sur place des parents d’élèves impliqués et qui n’hésitent pas à donner un peu de leur temps pour faire vivre ce jardin afin que nous puissions profiter de certaines récoltes à la rentrée.
Mais tout cela est possible car l’école est très spacieuse et que nous avons un espace terre qui a permis de planter des arbres, de faire un potager, de mettre un hôtel à insectes, des nichoirs, des abris chauve-souris, des mangeoires pour oiseaux… Toutes ces petites actions en faveur de la biodiversité nous ont permis d’avoir le label éco-école.
En te lisant Florian et en me documentant, je pense que la permaculture permettrait d’aller plus loin encore !


#54

Bonjour à toutes et tous !

Merci pour ce sujet. Les liens entre permaculture et éducation semblent infinis.

Je partage ici notre expérience associative à Nice… et notre actualité :
PE dans l’éducation nationale (mémoire de M2 : permaculture et apprentissages scolaires ;-)) , j’ai co fondé un jardin pédagogique en permaculture (1ha).

Ce jardin est habilité ferme pédagogique par l’EN depuis 2019 et on reçoit de nombreuses classes. Nous accompagnons des écoles via le dispositif que je partagerai dans ce sujet un peu plus tard (Ecoles En Transition, 3 ans, financé par la métropole niçoise donc gratuite pour les 10 écoles actuelles)

Sur le site du jardin, nous avons ouvert un “centre ressource pour enfants en IEF” : jardinage, éco-contruction, vie dans la nature inspirée des 8 shields…
Nous avons déposé en juillet un dossier de demande d’agrément d’école privée hors contrat, supportée par une SCIC (Société Coopérative d’Intéret Collective).

Dans ce cadre, je prends place en directeur à mi temps (décharge ;-)), secondé par des permaculteurs de l’asso. Nous souhaitons offrir au groupe (18 enfants pendant 2 ans, 36 ensuite, à la livraison d’un bati éco construit) un-e enseignante à plein temps. L’approche de Céline est une immense source d’inspiration pour nous (j’inclus les parents) et nous serions honorés d’avoir un-e personne souhaitant la mettre en place, en synergie avec tout ce qui peut se tisser sur le site : péda de projet et “vie pratique” en mode perma au jardin, coopératif…

Si ça résonne pour certain-e-s d’entre vous, merci de me contacter (agrément espéré fin octobre en fonction des 3 mois de la loi Gatel).

D’ici là, une petite vidéo du lieu (pas de suspense lié à cette vidéo : nous achetons le lieu, signature le 7/9)

Quoi qu’il en soit, je reviens vite vers vous avec des partages et ai hate de tisser des liens avec d’autres perma-éducateurs-trices ici !


#56

Il me reste trois axes à développer pour avoir abordé les douze principes de la permaculture. C’est une gageure que je me suis fixé il y a un an maintenant, de reprendre chacun de ces principes dans le contexte scolaire. Il y aurait pour chaque point tant de choses à dire encore, au risque de me répéter parfois. Je finirai par mettre tout cela en forme pour le publier de façon à ce que ça puisse être utile aux collègues qui souhaitent poursuivre cette démarche.

Se servir de la diversité et la valoriser
Ou comment encourager la diversité des parcours d’apprentissage dans la classe, mettre en valeur les initiatives, favoriser les échanges positifs entre élèves différents, reconnaître la spécificité et les intelligences de chacun, émanciper et faire gagner en confiance.

Utiliser les bordures et valoriser la marge
Ou comment retourner les expériences dérangeantes et imprévues en opportunités pour la classe, rebondir sur les idées des élèves, rediriger les élèves perturbateurs dans une énergie constructive plutôt que provocatrice, faire fi des contraintes ou s’en servir, ne pas trop se prendre la tête si ça ne se passe pas comme prévu, et s’arranger toujours pour arriver quand même à ses fins.

Face aux changements, être inventif
Ou comment faire preuve d’originalité pour faire face aux situations qui paraissent insolubles, garder un cap dans la tempête, rester ouvert, ne pas se décourager, contourner les problèmes, être souple la plupart du temps mais ferme sur ce qui est primordial, savoir préserver l’essentiel.


#57

Ce travail de réflexion, à priori très théorique, me permet de me projeter dans la classe sur des temps plus long. Comme je garde les enfants deux ou trois ans de l’âge de 2 à 4 ans, mes objectifs ne sont pas uniquement que les enfants s’adaptent au fonctionnement de la classe, ce qui se fait naturellement en quelques semaines. Je prend à cœur qu’ils intègrent et réinvestissent sur le long terme les valeurs de vie collective, de respect et d’émancipation qu’ils auront expérimenté à l’école. Ces valeurs qui permettent au groupe classe de tourner, mais également à chacun des divers élèves de s’épanouir, trouver sa place dans le groupe, faire des choix et prendre des initiatives.

J’aimerais que chacun progresse dans ses apprentissages par une motivation personnelle, et non imposée par l’enseignant. C’est une gageure, car le chahut et l’infantilisation peuvent vite reprendre le dessus. Mais le pari est qu’en prenant du plaisir à bien travailler à l’école, ce temps imposé devienne vite un moment privilégié, que les enfants viennent à l’école avec le sourire et l’envie d’apprendre avec les autres.

Je chéris ces moments bénis de classes où tous les élèves sont en activités dans le calme, que les interactions entre eux se font en chuchotant, gentiment, et dans le cadre des apprentissages. Et j’apprécie mieux encore quand, hors du cadre de la classe, un élève reprend naturellement des habitudes de classe qu’il a intégré. Je suis agréablement surpris quand je vois un enfant poser la main sur l’épaule d’un autre, chuchoter, faire preuve d’empathie, partager, lui expliquer ce qu’il sait, prendre des initiatives, dire non et faire valoir son avis.

Je ne suis pas dupe non plus du peu l’influence que l’on peut avoir face à ce que vivent certains enfants dans le contexte familial, ou face aux messages martelés par la publicité et aux valeurs mortifères véhiculée par la société de gaspillage dans laquelle nous baignons. Mais nous préparons les enfants au monde d’après, où les valeurs humaines seront plus précieuses que les biens matériels. Et autant expérimenter cela dans le cadre protégé de l’école ou de la famille. La communication bienveillante, la démocratie participative, la prise d’initiative, le libre choix, le respect concret des valeurs de liberté, égalité et fraternité, la fin du patriarcat, le respect du vivant, de la nature … Espérons que cela donnera la force aux futurs adultes de défendre ces valeurs dans la société de rupture qu’ils auront à construire sur les ruines de ce que nous leur aurons légué.


#58

Pour revenir à la classe, je ne prétends pas non plus que ce soit idyllique, ces valeurs ne sont pas évidentes tous les jours. C’est la méthode Coué, je tente de me persuader. Mais je garde le cap, je ne désespère pas. Certains jours la fatigue des élèves se fait sentir. D’autres jours je ne me sens pas à la hauteur de mes ambitions.

Toutefois, ces réflexion m’ont permis en un an de modifier concrètement et dans la durée certaines de mes pratiques de classe. Voici quelques exemples dont je suis satisfait. A chacun de trouver ce qui lui convient, je ne prétends pas détenir de vérité. Et c’est en constante évolution, en fonction du contexte et des enfants. Sachant que je suis en zone rurale préservée, que je bénéficie enfin depuis deux ans d’effectifs confortables, et que j’ai la chance cette année d’emménager dans de nouveaux locaux spacieux. Rien à voir avec ce que vivent d’autres collègues.

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La conduite des ateliers.

Je pense avoir trouvé un juste milieu entre les activités libres autonomes mais trop limités et répétitives, et la conduite d’ateliers dirigés tournant imposés et directifs. La plupart du temps, je me pose en atelier avec un groupe d’enfants volontaires, dont certains que j’ai invité à me rejoindre pour travailler une compétence qu’ils ont besoin de revoir, et d’autres élèves perturbateurs à qui je ne laisse pas le choix que de s’asseoir avec nous. Je dois juste réussir à limiter le nombre, car de nombreux curieux sont là aussi qui souhaitent regarder, puis veulent essayer, et je n’ai pas toujours le cœur à le leur refuser, mais il le faudrait sinon c’est ingérable.

Je garde cependant régulièrement en fin de matinée un temps d’ateliers par groupes d’ages (j’ai trois groupes de couleurs de 7 à 8 enfants chacun). Ce petit temps est souvent remplacé par des lectures d’histoires, un regroupement, un temps collectif dans la salle de motricité ou en extérieur. Mais, quand il a lieu, cela me permet de bien communiquer à tout un groupe d’age les consignes une activité nouvelle, de faire avec eux, de vérifier que tout le monde a bien compris et essayé. Ces activités présentées en atelier aux élèves d’un groupe couleur seront généralement proposée en activités libres par la suite, afin que ces derniers puissent recommencer et réinvestir, et que les élèves des autres groupes couleur puissent faire l’activité s’ils le souhaitent, en demandant si besoin à ceux qui savent de le leur présenter.

L’emploi du temps

Voila enfin un terme que j’ai banni de mes préparations. Fini les petites cases à remplir jour après jour. Fini les activités que l’on s’impose, les contraintes de temps qui nous font stresser et presser les élèves dans leurs activités, les prises de paroles intempestives qui marquent la fin d’une séance. Les seules contraintes de temps que je me donne sont les heures d’entrées et de sorties de classe, car il faut bien les rendre aux parents à un moment donné !, et les heures d’occupation de la cour de récréation. Et encore, je laisse souvent passer la récréation de l’après-midi, car quand les enfants sortent de la sieste, c’est un bon moment de travail tranquille, et ce n’est pas toujours judicieux de les couper par une récréation à 15h. Sinon je ne m’impose aucune contrainte d’horaire ; je fais en fonction de l’ambiance de la classe, de la fatigue des enfants, du temps qu’il fait et du temps qu’il nous reste.

En revanche, j’ai toujours quelques séances et activités préparées sous le coude, prêtes à être proposées quand je sens que c’est le bon moment. Souvent même, c’est à l’initiative d’un élève qui a repéré le matériel que j’ai préparé sur l’étagère et qui me demande de le lui présenter. Certaines activités tardent car je ne trouve pas le moment idéal, ça fait deux semaines que l’on a écossé des haricot et que j’attends de les semer avec les élèves Semer des graines de haricots.pdf En revanche, j’ai sauté sur l’occasion du temps estival de la semaine pour sortir mes activités avec l’eau que j’avais prévu bien plus tard Manipulation eau encre.pdf ; aussi car je sentais les enfants prêts à maîtriser leur posture et leurs gestes des deux mains sur des empilements, ils se sont entraîné depuis la rentrée sur des empilements de tours Tour cylindres .pdf.

Le suivi des élèves

J’ai consacré un sujet sur ce thème, que j’ai intitulé “Accompagnement des élèves”, dans lequel je publie de nombreuses fiches de suivi et comment je les utilise. Je veux parler ici de comment j’ai fait évoluer ma pratique dans ce domaine, en lâchant prise. Je me suis longtemps tenu à un suivi systématique de chaque élève, de ses compétences, des activités qu’il maîtrisait. J’ai usé de diverses astuces : de temps d’observation systématiques, avec de grilles d’observation à cocher, d’un cahier de prise de notes, de photos des élèves en activités, les photos des élèves collés sur le matériel qui leur avait été présenté, de carnet de fiches de suivi reliées que les enfants gardaient avec eux pour travailler, de grands cahiers du jour que les enfants devaient ouvrir pour choisir une activité à reprendre, d’étiquettes couleur, d’étiquettes déplaçables, d’étagères de diverses hauteurs en fonction de l’âge …

Avec le temps je lâche prise et je me contente d’essayer de prendre le temps de compléter régulièrement des fiches de suivi des activités que j’ai présenté aux élèves. Quand c’est collectif, je colle dans tous les cahiers du jour, et j’évalue après coup pour ceux que j’aurais pu observer, si j’arrive à m’en souvenir. Pour les présentations individuelles, il faut que je sorte la fiche appropriée qui est prête sur mon bureau et que je la complète pour l’élève concerné. Généralement je ne prend pas le temps de le faire au moment de la présentation. Sauf si je ne sais plus où j’en suis avec cet élève, dans ce cas je prends le temps de feuilleter son grand cahier de vie pour voir si j’ai déjà complété cette fiche et à quel niveau de consigne il en est.

Mais je ne vais par me mentir, la plupart du temps, je le fais après coup en fin de demie-journée (ou à la récré) pour les quelques observations d’élèves qui m’ont marqué et dont je me souviens. Le reste passe à la trappe. J’ai fais mon deuil de tout noter par écrit. Ces fiches de suivi sont un témoignage écrit non exhaustif dans le cahier de vie, un support de communication avec les parents, et un support de langage pour que les enfants racontent leur journée.

Le plus important est de repérer les élèves en difficulté, et d’y consacrer du temps, ne pas les lâcher. Ne pas se faire dépasser par les multiples sollicitations d’élèves demandeurs ou chahuteurs. Se laisser la liberté de choisir les élèves et les activités que l’on souhaite présenter. Faire des fiches de suivi en priorité pour ces élèves en besoin. Les autres, c’est un luxe que l’on ne peux pas toujours se permettre, ou juste de temps en temps pour donner un aperçu de leur travail en classe.

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Voici quelques exemples de lâchages dans mes pratiques de classe qui me permettent de prendre du recul, me donnent du temps à consacrer aux élèves qui en ont besoin, me font plus souvent finir mes journées plus serein et moins vanné, et m’autorisent à avoir une vie en dehors de l’école !

Cette évolution est constante dans notre métier ; de notre formation à la retraite nous faisons tous énormément évoluer nos pratiques pédagogiques. Je vais donc continuer à évoluer.

La lecture du livre de Céline Alvarez (merci à toi @Celine ) m’a fait passer un grand cap, à un moment où j’en avais besoin car je faisais ma rentrée avec 37 élèves de maternelle, toutes sections confondues. Depuis plus de deux ans que je suis revenu à des effectifs normaux d’une vingtaine d’élèves, mes réflexions en permaculture humaines m’ont permis d’affiner ma pratique, de la personnaliser dans un sens qui me convient bien (et qui ne conviendra pas forcément à d’autres).

Voici pourquoi je partage cette expérience sur ce forum. Merci à vous tous et toutes qui prenez le temps de me lire ; et merci à tous ceux qui postent également leurs expériences, qui sont toutes très enrichissantes. :upside_down_face:


Journées éco(lo)citoyennes
#59

Merci Florian, je suis comme toi, plutôt à voir le positif dans ce que je fais, et je suis obligée de nuancer parfois parce que je me rends compte que les personnes à qui j’en parle imaginent soit que j’évolue dans l’environnement idéal, soit que je suis la maîtresse idéale! Lol!
Et je me rends compte en te lisant que j’imaginais ça de toi ;-). Le fait que tu nuances m’aide à prendre du recul, sur tes écrits et sur ma propre pratique et sur le retour que j’en fais aux autres aussi.

Merci encore de partager si bien!


#60

L’objectif d’une classe en pédagogie active est d’encourager la diversité, les prises d’initiatives, les choix assumés de chacun des élèves. Former un citoyen est avant tout habituer les enfants à ne pas se laisser dicter leur conduite, prendre confiance en eux, et leur donner les outils pour éclairer leurs choix, en parler, le valoriser. Vivre en collectivité c’est avant tout respecter les autres dans leur travail et leur personne, et apprendre à communiquer de façon positive, sans juger.

Ce libre choix responsable est la principale différence avec la gestion de classe en cohorte, dont l’objet est de faire avancer tous les élèves à la même vitesse et dans la même direction, en programmant les compétences, les leçons, les exercices. En tachant dans le meilleur des cas de ne laisser aucun élève “en difficulté” de côté. Idéalement, les programmes nous invitent à différencier les apprentissages selon les élèves. Mais cette injonction reste somme toute théorique dans un fonctionnement de classe classique, malgré toute la bonne volonté des enseignants.

Pourtant, pour peu qu’on leur en laisse la possibilité, la personnalité de chaque élève s’affirme très tôt. J’observe très vite différents types de comportements dans la classe. Et ce avec les tout petits dès leur arrivée, une fois passé les petits pleurs, les quelques jours, d’observations, de mise en confiance, de prise de marques.

Beaucoup d’élèves recherchent clairement le lien social quand ils viennent à l’école. Ils vont de suite au contact des autres élèves. Ils sont suiveurs ou meneurs dans les activités. Ils cherchent le contact, parlent parfois forts et trop. Ils zappent les activités au gré des modes et nouveautés. Ils s’agglutinent et suivent le troupeau, grégaires.

Difficile d’aller contre, c’est un besoin fondamental. D’autant plus que certains enfants ont peu d’autres occasions d’interactions sociales avec d’autres enfants à la maison ; les fratries sont peu nombreuses, les familles réduites ou éloignées, les voisinages cloisonnés. Bref, trop d’enfants sont coincés chez eux, seuls, souvent devant des écrans. Au lieu d’avoir la chance de passer la journée à jouer avec ses frères et sœurs, ses cousins et cousines, ses amies. Les rues et places de villages (et encore pire en villes) sont bien vides ; on ne voit plus de bandes de gamins livrés à eux-même. La “guerre des boutons” n’est plus d’époque.

Comment valoriser cette tendance afin que ces élèves trouvent leur place dans la classe et s’émancipent ? Encourager les échanges c’est d’abord en maternelle favoriser le langage oral, qui n’est pas évident car la plupart des situations se gèrent spontanément sans parler.

Naturellement, un enfant qui refuse va taper, pleurer, ou fuir. Sans avoir besoin de parler, il va se faire comprendre. Apprendre à dire NON est un grand pas. Les conditions doivent êtres réunies pour que l’enfant sache que son refus sera entendu et respecté. C’est notre rôle d’éducateur que de créer artificiellement ces conditions par des règles de classe claire qui favorisent la prise de parole et son respect. J’ai mis en place en classe des messages clairs codifiés. On pose la main sur l’épaule avant de s’adresser à quelqu’un, enfant comme adulte. Puis on lui exprime clairement sa demande, sa remarque, qu’il doit écouter et respecter, mais qu’il a le droit de refuser. C’est la procédure par exemple pour demander à partager un matériel qu’un autre enfant a sorti. Les enfants suiveurs vont ainsi être encouragés à communiquer par la parole pour demander, s’ils ne veulent pas rester juste à regarder. Et les enfants meneurs vont devoir répondre aux sollicitations. C’est un travail de longue haleine, et complètement imposé par l’enseignant, en commençant par donner soi-même l’exemple.

Mais certains enfants prennent goût à cette règle qui leur donne le pouvoir de décider sans se faire envahir ni voler leur matériel pas toute une horde d’enfant curieux et envieux de l’activité qu’ils viennent de sortir. C’est le cas en particulier d’une deuxième catégorie d’enfants, indépendants, qui aiment être tranquilles et ont tendance eux à fuir le groupe. Là aussi, le sentiment de possession d’un matériel est fondamental. Et ces enfants se sentent en insécurité si une autre règle n’est pas mise en place par l’enseignant, de façon encore une fois très artificielle.

Pour les rassurer, il faut très vite instaurer en classe le fait qu’un matériel sorti par un élève lui appartient aussi longtemps qu’il le souhaite, jusqu’à ce qu’il le range. Si un autre élève souhaite le partager un temps, il devra demander la permission. Mais l’élève qui l’a sorti en reste responsable du matériel, il lui incombe de le ranger correctement à sa place, comme il l’a trouvé. Avec de l’aide s’il faut. Beaucoup de puzzles, jeux d’assemblages, casse-têtes, ont un intérêt principalement dans leur rangement. C’est pourquoi cette règle est importante pour les apprentissages. Sans parler du confort de travail dans une classe que les enfants apprennent à ranger d’eux même. Mais c’est avant tout une sécurité pour ces quelques enfants qui cherchent la tranquillité, la solitude. On ne les dérangera pas dans leur travail. J’essaie moi aussi de respecter cette règle, en demandant à un élève la permission pour toucher le matériel le temps de lui présenter les consignes. Au risque d’essuyer parfois des refus, que je respecte si le matériel n’est pas détourné. Sinon je le dis clairement, en prenant le temps de poser la main sur l’épaule !

Voilà pour conclure, diverses catégories d’élèves dans la classe, les élèves meneurs, suiveurs, et les enfants solitaires. Je respecte les besoins fondamentaux de chacun, besoin de lien social, besoin de sécurité. Et je mets en place des règles et des situations scolaires, artificielle certes, mais qui encourage chacun à développer sa spécificité dans le respect des autres. Les élèves qui souhaitent s’isoler ont la garantie qu’on ne les dérangera pas. Les élèves suiveurs savent qu’on ne peut pas les empêcher de regarder et qu’ils peuvent participer en demandant. Les élèves meneurs savent qu’ils ont le droit à l’initiative, mais qu’il faudra ranger, et respecter les consignes sans détourner le matériel. Chacun apprend à sa façon : en montrant aux autres, en regardant, en s’entraînant seul. Et cela évolue selon l’age, le moment de la journée, le type d’activité, les envies de chacun, les réussites et les encouragements. :slightly_smiling_face:


#61

Nous avons tous vécu des journées au cours desquelles tout semble partir en vrille. Rien ne se passe comme prévu. Le climat est électrique, le temps est à l’orage, ou à la neige. Dans ces cas, on joue la montre. Et quelques activités toutes prêtes ou improvisées nous permettent de sauver les meubles. Pas forcément de grands objectifs pédagogiques individualisés. Mais quand même, on révise des notions. On n’est pas encore dans l’animation de groupe, même s’il n’y pas de honte lâcher prise parfois sur le scolaire à tout prix. Voici quelques exemples d’activités qui me permettent de gérer ces temps de transition. Et de mieux rebondir par la suite. Laissez vous aussi vos témoignages.